Vous l'avez peut-être remarqué, mes commentaires sont maintenant fermés, à mon grand regret. Je reçois beaucoup de courrier me demandant pourquoi. Daniel trouve cela désagréable, Niko a même ouvert une pétition ! Il y a quelque temps, l'ami Padawan écrivait un billet intitulé Weblogs sans commentaires, alors que Philippe mentionnait les Counter Posts : de toute évidence, le problème n'apparait pas que chez moi. Dans un sens, c'est rassurant. Je pense toutefois que tout cela est lié à la fois à mes propos (et donc aux sujets que j'aborde), mon lectorat (grandissant), et au peu de temps que j'ai pour bloguer (et donc pour modérer). Je vais aborder ces différents points :

Propos dérangeants

Mes propos sont souvent dérangeants pour beaucoup de gens. Ils ne sont pas aggressifs, mais ils peuvent contredire des habitudes (mauvaises à mon goût) prises par certains de mes lecteurs.

  • Quand je parle d'écologie, c'est pour dire qu'on ne va pas pouvoir durer longtemps comme cela (autrement dit, notre développement n'est pas durable, pour faire branché), et donc qu'il faut changer nos habitudes de consommation, de transport. Très peu de gens sont prets à entendre cela.
  • Quand je parle de standards, c'est aussi pour faire évoluer les pratiques des développeurs Web, trop souvent scotchés à l'ignoble FrontPage ou à DreamWeaver 3, qui produisent du code immonde non compatible avec les navigateurs modernes. Là aussi, les propos dérangent : il faut changer les habitudes.
  • Quand je parle d'accessibilité, je fais nécessairement référence aux personnes handicapées. Ca aussi, ça dérange.
  • Quand je parle de technologie, c'est aussi pour appuyer là où ça fait mal. Microsoft veut m'imposer le DRM ? Je vire Windows ! Le DRM, à part Universal et Microsoft (et quelques autres), personne n'en veut, soyons clairs. Mais voilà, ça demande un effort d'éviter le DRM. Alors on préfère ne pas y penser et se laisser faire. Encore un sujet qui fâche.
  • Quand je parle de TF1, de politique, de marchandisation du monde, des devoirs du blogueur, je prends un certain nombre de personnes à rebrousse poil.

Lectorat grandissant

Mon lectorat grandit. C'est un fait. Il y a deux ans, avec 50 lecteurs par jour, je bombais le torse. Aujourd'hui, c'est probablement 30 ou 60 fois plus (pas facile à dire, avec certains aggrégateurs qui faussent les chiffres). A coté de Libé, du Figaro ou de TF1, c'est totalement négligeable. Il n'en reste pas moins que le lectorat a grandement evolué. Au début, c'était une bande de geeks et/ou intellos souvent à la pointe sur les questions techniques (informatique, environnement, politique). Du coup, le niveau ne pouvait que baisser. C'est ce qu'il a fait. Par là même, les commentaires de bon niveau, ce qui contribuaient à la qualité du StandBlog, se sont faits plus rares. Par contre, les grandes gueules pas très au fait des sujets abordés, se sont multipliées. Je parle de dioxyde de carbone et d'association pour l'écologie ? On me répond des énormités comme C'est ridicule! C'est une caractéristique des écolos démagos ! (...) Je suis certain que le dirigeant de l'association sus-citée ne se prive pas de se rendre en grosse voiture bien grasse à son boulot. Ben tien. Consternant. Celui qui laisse le commentaire est peut-être en colère, et c'est finalement normal, on vient de lui dire que sa planete va lui pêter à la gueule d'ici la fin du siècle. Alors voilà, il crache sa bile dans les commentaires, il nous chie un étron puant en bas de page et s'en va regarder TF1 ou faire un tour en 4x4 pour se détendre. Les paroles s'envolent et les écrits restent, et justement, son commentaire reste. Ses propos sans arguments figurent à coté des miens et les desservent. Et comme le lecteur préfère qu'on lui susurre tout va très bien, madame la Marquise, il en conclue que le râleur a raison. Là je vous parle d'écologie, mais c'est pareil avec Microsoft contre le Libre, les brevets logiciels (qui, c'est bien connu protègent l'innovation) et bien d'autres sujets. Mon blog n'est pas une tribune pour hydrocéphales vitupérants et réactionnaires.

Le temps pour bloguer

C'est pour éviter la multiplication des commentaires simplistes qui décrédibilisent mes propos que j'ai été dans l'obligation, dans un premier temps, de supprimer les commentaires les plus fâcheux. Mais cela prend trop de temps, car j'ai surtout tendance à vouloir expliquer au râleur en quoi il a tord. Du coup, je réponds dans un commentaire, avec du retard, et je sais qu'il sera moins lu que le coup de gueule du râleur qui a la tête un peu près du bonnet. Bref, ça prend du temps de ne pas succomber à l'arbitraire et à la modération des commentaires. Et puis ça m'oblige à tout justifier, à défendre mon propos 10 fois par jour. Et ça, c'est minant. Usant.

Aujourd'hui, j'ai besoin de temps (et d'énergie) pour faire ce qui m'occupe (dont OpenWeb, le lancement de Firefox, ma famille et autres). J'ai donc supprimé les commentaires. Encore une fois, la minorité des gens qui pèsent leurs propos et ajoutent de la valeur est prise en otage par les braillards, les populistes et les cons. On appelle ça le nivellement par le bas.

La décision a un goût amer, mais il me fallait la prendre. J'en suis désolé. Peiné aussi, de ne plus lire les commentaires, le matin vers 8h20, quand j'allume ma machine. Mais je suis aussi soulagé de ne plus avoir à porter cela sur mes épaules. J'ai besoin de mon énergie pour des projets autrement plus important que de me justifier 10 fois par jour par écrit.