Un article très intéressant vient de paraître dans Business Week : Linux inc.. Il fait la couverture de l'édition américaine. Voici quelques morceaux choisis.

A propos des entreprises qui ne jouent pas le jeu :

Dans la communauté Linux, on ne s'incline pas devant les riches et les puissants. Les pontes et les product managers d'HP, IBM, Intel et Oracle n'essayent pas de mettre la pression sur Torvalds et Morton pour faire avancer leurs intérêts. A la place, leurq suggestions passe par leurs ingénieurs qui, en tant que membres de la communauté Open Source, soumettent des patches pour le noyau ou d'autre morceaux du logiciel Linux. Les grandes puissances de l'informatique ont appris à jouer en respectant ces nouvelles règles. On ne peut pas se réunir en privé, arriver avec de nouvelles fonctionnalités puis donner des changements importants à Torvalds. Une poignée de sociétés, dont Intel et Nokia, ont appris cela à leurs dépends quand elles ont tenté de premettre à Linux de faire tourner des équipements télécom. Deux douzaines de leurs ingénieurs ont travaillé sur le projet carrier grade Linux et ont publié fin2002, sur un site Web, les centaines de milliers de code résultantes. La communauté fut outragée. Cette méthode nous a offensé, explique Alan Cox, un contributeur important. Le code fut rapidement retiré.

Voilà qui rappelle bigrement l'attitude d'Apple sur le navigateur Libre Konqueror/KHTML, qui a servi de base à Safari/Webcore. On s'est demandé pourquoi Apple n'est pas parti de la base de code de Gecko (projet Mozilla), alors qu'ils avaient embauché David Hyatt, un des pontes du projet Mozilla (à l'origine de Firefox avec Blake Ross). Une des raisons était qu'Apple n'aurait pas pu détourner le projet comme bon lui semble, car la communauté Mozilla, beaucoup plus importante que la communauté Konqueror, ne se serait pas laissé faire. (Notons qu'il y a aussi des raisons techniques, comme le fait que KHTML n'a pas cet aspect multiplate-forme qui complexifie le code de Gecko, ce qui rend plus difficile son appropriation). Certains pensent que si Apple a choisi le projet BSD comme base de son système d'exploitation OSX/Darwin, c'est aussi parce qu'il est plus malléable qu'un projet comme Linux, qui offre une communauté infiniment plus grande, mais qui se laisserait moins facilement bousculer.

A propos du prix du logiciel Libre et de Linux en particulier

Le coût n'est pas l'unique raison qui fait que les entreprises passent à Linux. La société de traitement de données Axciom Corp. a récemment migré plusieurs serveurs sur ce système d'exploitation, après avoir utilisé Unix par le passé. Alex Dietz, son directeur informatique, affirmer qu'il pense remplacer Windows par Linux sur les postes de travail de l'entreprise. Un des principaux arguments : Axciom ne veut pas trop dépendre de Microsoft. [Linux] offre intrinsèquement la garantie que vous ne serez pas pris en otage, affirme Alex Dietz.

Une jolie citation de Miguel de Icaza (Novell / Mono)

Elle manque un peu de poésie, mais démontre bien que décider de lâcher prise permet de mieux produire à plusieurs que chacun de son coté :

la coopération vous emmène plus loin que quand vous vous contentez de baiser votre voisin

A propos de la mutualisation à la mode Libre

Et c'est la conclusion de l'article :

(...) Linux Inc. a emergé d'un nouveau modèle de collaboration pour le développement logiciel, qui pourrait bien avoir des répercussions dans le monde des affaires. Son principe est celui du monde Libre : donner un peu, recevoir beaucoup. Dans un environnement économique où l'efficacité est reine, c'est une approche très puissante. Suffisament peut-être pour faire descendre Microsoft de son piedestal.

Je trouve ce donner un peu, recevoir beaucoup très réducteur. Certes, il reflête le principe même de la mutualisation, où chacun reçoit plus que ce qu'il a donné. Mais certains prennent sans rien donner ou presque, alors que d'autres donnent beaucoup. Le vrai fond du problème est là, et il reste à trouver un modèle où les utilisateurs donnent alors qu'ils pourraient se contenter de se servir. Je reviendrais sur le sujet : j'ai quelques idées en train de mûrir la dessus.

Pour finir, un petit graphe sur les parts de marché.