Attention, coup de gueule…

Le Monde teste l’iPhone 8, qu’il trouve plutôt bien et conclut par cette phrase qui me fait hurler :

Ne nous mentons pas : en 2017, pour acquérir un excellent smartphone, un chèque de 800 euros n’est plus nécessaire. Samsung ou Oneplus proposent de remarquables smartphones Android aux environs de 400 euros.

Si l’on en croit Clubic, l’iPhone 8 coûte 247,51$ à fabriquer. Certes. Mais c’est oublier le coût de transport (par avion !) et le coût de distribution (il faut voir le luxe des Apple Stores et la marge des intermédiaires si on l’achète ailleurs). Il y a les frais d’homologation dans les différents pays.

Mais il faut aussi et surtout penser au prix du logiciel : système d’exploitation, applications Apple (Mail, Calendar, Plans, Photos, etc), et services associés, coûts qui sont assumés à 100% par Apple[1].

Vous me direz que Google a la même structure de coût avec Android, sauf que c’est faux. Si Samsung et Oneplus arrivent à sortir des smartphones Android à 400€, c’est d’un parce qu’ils n’ont pas un positionnement premium mais surtout parce qu’ils ne payent pas ni le système d’exploitation ni les applications associées, qui sont fournies gratuitement par Google en échange… de vos données.

La réalité, c’est que tout l’écosystème Android repose sur la subvention du logiciel et des services en ligne par le pompage de données personnelles. Si Samsung a Android et ses apps gratuitement, c’est parce que par contrat, il est obligé d’inclure les apps dans le téléphone et les mettre en avant. Ces apps (GMail, Calendar, Photos, Search, Maps & co) sont autant d’opportunités pour Google de pomper vos données !

S’il fallait résumer la situation, on pourrait le faire comme ceci :

Acheter un téléphone Android bon marché, c’est un peu comme si on le prenait à crédit en faisait un premier payement de 400€ et en payant quotidiennement avec ses données personnelles.

Forcément, payer un iPhone 800€ semble plus douloureux au début, mais au final ça revient moins cher.

C’est dommage que Le Monde, publication pourtant sérieuse, passe à coté de cette réalité, alors qu’il a le devoir d’informer ses lecteurs sur des sujets comme celui-ci. Attention, ça ne veut pas dire que j’idolâtre Apple : je trouve inadmissible la censure qu’ils exercent sur l’App Store. Mais sur les données personnelles, ils sont structurellement plus respectueux que Google et ses partenaires, dont le business model est fondé sur le pompage et l’analyse des données personnelles, le ciblage publicitaire.

Mise à jour du 2/10/2017

Certains commentateurs pensent qu’Apple et Google font la même chose en terme de collecte de données. Ils passent à coté que structurellement, Google a son ADN dans la collecte et l’analyse des données pour la personnalisation et plus que tout, la monétisation par la publicité ciblée.

Le boulot de Google, avant tout, c’est de vendre de la publicité ciblée. Tout le reste découle de cela. La vente d’appareils collectant les données est une suite logique de leur business central.

A contrario, le boulot d’Apple, c’est de vendre des gadgets haut de gamme innovants avec de fortes marges.

Certes, il est indispensable pour Apple d’offrir des services complémentaires qui touchent à la donnée (ne serait-ce que la sauvegarde en ligne) pour être compétitif, mais la collecte et l’analyse de la donnée n’est pas ce qui les fait agir. On le voit ensuite dans les technologies mises en œuvre par Apple pour protéger la vie privée. Secure Enclave, par exemple. Differential privacy, aussi. Le fait qu’Apple ait tenu tête au gouvernement américain lors de l’affaire de San Bernardino montre qu’ils sont capables de monter au créneau si nécessaire, même si c’est dangereux pour leur (très précieuse) image : oser affronter le gouvernement dans une affaire de terrorisme, c’était fichtrement osé (et nécessaire).

Quelques liens pour bien comprendre l’approche d’Apple sur la sécurité des données et la vie privée :

Note

[1] J’exclue ici les coûts de l’App Store, qui s’auto-finance avec la vente d’applications et de contenus.