La cryptographie est une des pierres angulaires du contrôle de nos données. Elle permet, en utilisant un secret appelé clé (généralement un mot de passe), d’assurer la confidentialité, l’authenticité et l’intégrité de données, qu’il s’agisse de fichiers ou de messages.

La cryptographie est essentielle aujourd’hui, car nos différents appareils (PC, smartphone, tablette, serveur) communiquent entre eux via des réseaux interconnectés sur lesquels nous n’avons pas le contrôle : il est possible qu’un tiers écoute nos données pendant qu’elles transitent et cherche à en récupérer une copie, souhaite modifier nos messages ou veule se faire passer pour quelqu’un qu’il n’est pas.

Un peu de vocabulaire

  • Chiffrer : transformer un contenu en clair à l’aide d’une clé (le mot de passe) en un contenu incompréhensible, le contenu chiffré.
  • Déchiffrer : transformer un contenu chiffré (donc incompréhensible) en contenu en clair à l’aide de la clé.
  • Décrypter : retrouver le contenu en clair à partir du contenu chiffré sans avoir la clé.
  • Crypter : ce verbe n’existe pas et ne devrait donc pas être utiliser en français (mais nos amis québécois l’utilisent à la place de chiffrer).

Mot de passe et cryptographie symétrique

L’utilisation d’un mot de passe relève de ce qu’on appelle le chiffrement symétrique. Le mot de passe permet de chiffrer un contenu, et le même mot de passe sera utilisé pour déchiffré le contenu chiffrer pour retrouver le contenu en clair. Le chiffrement symétrique est très pratique dans certains cas (chiffrer ses fichiers sur son disque dur, par exemple), mais peu pratiques dans d’autres cas, par exemple pour envoyer un message à des correspondants. En effet, il faudrait aussi envoyer le mot de passe en clair pour qu’ils puissent déchiffrer ce que je leur envoie. Ensuite, à l’usage, mon mot de passe serait connu de plus en plus de gens, ce qui, par définition, le rendrait de moins en moins secret et de plus en plus inefficace.

Cryptographie asymétrique : clé privée et clé publique

La cryptographie asymétrique, aussi appelée aussi cryptographie à clé publique a été inventée à la fin du 20e siècle pour répondre aux limitations de la cryptographie symétrique (à mot de passe) expliquée ci-dessus.

Le principe repose sur l’existence de deux clés complémentaires. L’une est publique, connue de tout le monde. l’autre clé est secrète, connue seulement de son propriétaire.

Le contenu chiffré avec une clé peut être déchiffré avec l’autre, c’est ce qui donne le caractère asymétrique à ce genre de cryptographie et le rend très utile, en particulier dès qu’il s’agit d’envoyer des messages secrets à des tiers.

Ainsi, si Alice veut envoyer un message à Bob, elle prend la clé publique de Bob, qui peut être publié sur le site Web de Bob, par exemple, et chiffre le message avec. Seul Bob, détenteur de la clé privée correspondante, peut déchiffrer le message. Cela permet de préserver la confidentialité du message.

A l’inverse, si Bob chiffre un message avec sa clé privée, il pourra être déchiffré par tout ceux qui ont sa clé publique (qui est facile à trouver). On sera donc sûr que ce message a bien été envoyé par Bob. C’est un mécanisme de signature numérique qui permet d’assurer l’authenticité du message.

Le diable est dans les détails

L’obsolescence des algorithmes de chiffrement

Il existe de nombreux algorithmes de chiffrement, qui sont autant de méthodes possibles pour chiffrer et déchiffrer des contenus. Certaines de ces méthodes sont moins sûres que d’autres : le chiffrement repose sur les mathématiques et les chercheurs de cette science font des progrès réguliers, ce qui fait que certains algorithmes autrefois sûr ne le sont plus aujourd’hui, mais on découvre de nouveaux algorithmes qui sont encore plus solides. Comme les serrures du monde réel, la technologie progresse et ce qui était sûr hier ne l’est plus autant aujourd’hui.

Chiffrer le contenu ou le tuyau ?

Quand on veut transmettre un message secrètement d’un endroit à l’autre, il y a en gros deux méthodes :

  1. On chiffre le message lui-même, ce qui le rend illisible, et on l’envoie à son destinataire. Peut importe que d’autres le lisent en court de route, le contenu est incompréhensible. C’est le chiffrement de bout en bout.
  2. On ne chiffre pas le message, mais on le transmet par un moyen qui est sécurisé. On peut en effet créer un genre de « tunnel » sécurisé entre un ordinateur et un autre (c’est ce que signifie l’icône du cadenas et le S de HTTPS dans le navigateur Web). C’est le chiffrement de point à point.

Cette distinction entre chiffrement de bout en bout et point à point peut sembler minime, mais elle ne l’est pas. Prenons l’exemple du stockage de mes fichiers dans un service de « cloud ». Si le logiciel que j’utilise chiffre ces données localement avec une clé connue de moi seul, avant d’envoyer ces fichiers sur un serveur distant, je suis le seul à pouvoir lire mes données. Même si un pirate arrive à pénétrer dans le serveur en question ou si les autorités de police en font la demande au service, mes données sont illisibles car chiffrées.

Il arrive que des services de cloud promettent la main sur le coeur que nos données sont protégées car chiffrées. Mais en regardant d’un peu plus près, on découvrent que seul le transport de ces données est chiffré. En effet, mes fichiers transitent par un « tunnel sécurisé » entre mon ordinateur (ou mon smartphone) et le serveur distant. Mais elles y sont stockées en clair. Autrement dit, les services de polices et les éventuels pirates peuvent y accéder sans aucun problème. Et bien sûr, mes données peuvent être analysées par le service de cloud pour construire un profil de mes activités.

C’est pour cela qu’il faut bien se renseigner avant de choisir de tels services.

Dans le même genre, le très populaire service DropBox de partage de fichier est particulièrement fier de son système : les données sont chiffrées sur mon ordinateur, transitent aussi de façon chiffrées et sont stockées chiffrées sur les serveurs. Pourtant, certaines personnes dont Edward Snowden (le lanceur d’alerte de la NSA) est très clair : « il faut abandonner Dropbox ». La raison est toute simple : Dropbox chiffre nos données avec un mot de passe qu’elle conserve. Elle peut donc déchiffrer ces données sans qu’on en soit prévenu.

Conclusion

La cryptographie peut sembler complexe de prime abord, mais elle est essentielle pour protéger notre vie privée et contrer la surveillance de masse.