Le Web 2.0, c'est le dernier truc à la mode. Ce qui est fascinant, c'est que personne ne sait le définir correctement. Pour certains, c'est le mash-up, cette possibilité de "remixer" les applications entre elles via des API. Pour d'autres, cela passe nécessairement par l'utilisation d'AJAX ou par la possibilité de faire participer les internautes (par des wikis ou des blogs), voire d'utiliser RSS comme interface entre les services ou encore d'appliquer des tags sur tout ce qu'on voit.

Je me garderais bien de donner une définition de ce qu'est le Web 2.0, d'autant que je trouve le nom lamentable, car faisant l'impasse sur un point essentiel : le Web évolue constamment depuis sa naissance. J'ai du expliquer MCF à la presse mi-1997[1] puis démontrer RSS début 1999 (lancement de my.netscape.com). Ca ne nous rajeunit pas ! C'est à peu près à la même époque que j'ai vu les premières démos en internes du WebMail Netscape Messaging Server, tout en Ajax (bien avant que n'apparaisse le nom !), et ça fonctionnait sur Netscape 4 et IE4. Ca fait plus de 3 ans que je blogue et 4 ans que je participe au projet Mozilla. La première fois que j'ai utilisé un Wiki, c'était celui de Stephanie (encore elle) pour collaborer au lancement d'OpenWeb.

Si je vous liste tout cela, ça n'est pas pour me faire mousser, mais pour vous expliquer que toutes ces technos, ces usages, dont on nous rebat les oreilles, ce sont de vieux trucs !

Certes, l'usage va grandissant. Certes, les outils progressent, et c'est bien. Alors l'excitation monte ; il faut dire que l'informatique, ça n'est pas drôle tous les jours, alors un peu de nouveauté est toujours la bienvenue. Mais pour pouvoir désigner cet ensemble de pratiques et de techniques, il fallait un nom, et c'est Web 2.0 qui a émergé. Pas très heureux, entre nous, d'autant que les récupérateurs de tous poils se précipitent dessus en se demandant comment rentabiliser cela en faisant des conférences, des livres, des sites commerciaux, bref, n'importe quoi qui puisse faire rentrer de l'argent dans les caisses. C'est humain, mais pas forcément glorieux. Ca n'est pas nécessairement mauvais non plus : comme souvent, il peut y avoir une symbiose entre les parasites et l'animal ;-)

Mais ça n'est pas non plus parce qu'on prend des initiatives autour du Web 2.0 qu'on est une charogne. Par exemple, Stephane Lee et Fred Cavazza lance Phenix, un annuaire des talents du Web 2.0. J'ai rarement vu un site aussi moche, entre nous. Et alors ? Le site n'est pas parfait, mais il a le mérite d'exister.. Il va s'améliorer. Bien sûr, les vieux de la vieille, ceux qui ont vu la bulle Internet grossir puis exploser, ricanent ou crient à la récupération. Je les comprends. La bulle, ça n'était pas joli joli, croyez-moi. L'envolée vers le septième ciel boursier, c'était des Yuppies qui se confondaient le quartier du Sentier avec la banlieue de San José, qui claquaient en Mumm Cordon Rouge et redesign de sites Web l'argent que des gogos trop crédules leur avaient confié. La descente (aux enfers) n'en fut que plus dure : la chasse fut tirée sur une grande majorité de boites, dont certaines avaient des idées projets fabuleux. Au final, une seule chose fut unanimement et continuellement sacrifiée : le discernement.

Ainsi donc, les anciens, les prudents, les échaudés, voire tout simplement certains de ceux qui font le Web 2.0 ne veulent pas d'une Bulle 2.0.

Pourtant, ça n'est pas une raison pour descendre ceux qui prennent des initiatives. Je dis cela d'autant plus sérieusement que la critique, en France, on en crève.

Le Web 2.0, c'est certes un nom de merde, mais c'est c'est quand même révélateur de changement et de progrès. La période de la nouvelle économie fut celle d'une immense exagération. L'explosion de la bulle ne fut qu'un retour de balancier tout aussi exagéré. D'accord, le nom "Web 2.0" est mal trouvé. Il exaspère. Il rappelle de mauvais souvenirs. Mais je ne jetons pas à nouveau le bébé avec l'eau du bain. Le nom est pourri, mais la perspective est belle. N'oublions pas que c'est elle qui compte, bien plus que le nom.

Quelques liens sur le sujet :

Notes

[1] je me demande même si ça n'est pas à cette occasion que j'ai rencontré ?Tariq Krim, qui est derrière NetVibes.