Jeudi, sur Solutions Linux, s'est déroulée une amusante péripétie : une association, celle des Gruik Coders United/GCU (ça ne s'invente pas) décide de lever un peu de sous pour financer la création de la nouvelle structure de lutte contre les brevets logiciels, FFII.fr. La méthode est pour le moins originale, du moins dans le monde du Libre : on prend une jolie fille, on l'habille d'un T-shirt présenté comme collector (c'est un modèle qui ne sera pas réédité, parait-il), on la met debout sur une table dans une allée du salon, et on lance des enchères sur le T-shirt[1]. Au bout de quelques minutes, on plafonne à 55 EUR en progressant de quelques centimes à la fois. Il faut dire que pour le malheureux qu'est le dernier enchérisseur, 55 EUR, ça commence à faire une somme pour un T-shirt qu'il ne pourra pas mettre :-).

Je regarde la scène amusé, et je réalise que ça n'est pas comme ça que les choses vont progresser. Chez Bloïc, où l'on fréquente les riches et les puissants, on arrive à convaincre un mannequin de se jeter dans la piscine d'un milliardaire rencontré sur la route de Davos. Mais du coté des associations du logiciel Libre, comment dire pudiquement, les moyens ne sont pas les même (pas de piscine, pas de mannequins, peu de milliardaires)...

Faisant fi de ma légendaire timidité ;-), j'attrape un gobelet qui traînait par là, je m'empare gentiment du micro du Libriste qui faisait monter les enchères, et je lance un défi à l'assistance : Mandriva devrait participer aux enchères, et en rassemblant nos efforts, nous devons faire mieux, et j'explique que "Le Libre, ça fonctionne parce qu'on mutualise les coûts". Je sors toute ma monnaie de ma poche, environ 2,5 EUR. Je les mets dans le gobelet, et je me lance dans la collecte des fonds. 5 EUR par ci, 20 EUR par là. L'argent s'empile dans le gobelet qui ne va pas tarder à déborder. "Allez, les associations du Libre, il faut faire mieux que Mandriva !". Anne, de Mandriva, est annoncée au bout de l'allée. Je remets la pression. Anne arrive, pose l'argent sur la table, on renverse le gobelet et on mélange tout : sa collecte et la mienne... Nous sommes maintenant à près de 300 EUR. J'ajoute un billet pour faire bonne mesure.

Voilà. Avec Mandriva (qui n'a servi ici que de prétexte), on a réussi à donner un bon départ à FFII.fr en s'inspirant du principe du logiciel Libre qui est celui de la mutualisation des bonnes volontés, mutualisation d'autant plus efficace qu'on désigne un adversaire qu'il faut dépasser. Avec les système des enchères, on faisait reposer tout le poids sur les épaule du dernier enchérisseur, lequel finissait par redouter de devoir payer la somme. Avec la mutualisation, chacun donne ce qu'il peut, même si ce n'est que quelques piécettes. Les petits ruisseaux faisant les grandes rivières (dixit ma Grand-Mère, une Libriste qui s'ignore), nous sommes arrivés à plus de 300 EUR. Et j'ai récupéré, bien malgré moi, un T-shirt de fille marqué Léa-Linux, manifestement déjà porté. J'ai du expliquer longuement à Bénédicte son origine :-). Et ma petite Philippine s'est fait une joie de récupérer un "Linux pour les filles". En fait, le T-shirt, comme la concurrence avec la fine équipe Mandriva, n'était qu'un prétexte, car le véritable objectif est de lutter contre les brevets logiciels. Une lutte qui bénéficiera à tout le monde (sauf les cabinets d'avocats en propriété intellectuelle et les gros clients qui veulent verrouiller le marché informatique). Tout cela valait bien une poignée Euros et quelques postillons dans un micro.

Quelques liens :

Notes

[1] La jeune fille avait un autre T-shirt dessous, bien sûr. Et elle était volontaire !