Avec l’arrivée du smartphone, il est devenu nécessaire de synchroniser des fichiers entre notre ordinateur et notre smartphone, comme par exemple notre agenda, nos notes, nos documents… Pour cela, il faut que les deux soient allumés et connectés à Internet au même moment. Comme ça n’est pas toujours le cas pour les ordinateurs portables, on utilise un ordinateur qui est en permanence allumé et connecté à Internet, un serveur. Pour des raisons commerciales, on appelle cela le « Cloud », ou en français « l’informatique dans les nuages ». C’est une façon rassurante de présenter les choses, mais concrètement, le Cloud, c’est l’ordinateur de quelqu’un d’autre, ni plus, ni moins. Cela veut dire qu’on ne le contrôle pas du tout, et c’est bien souvent par son intermédiaire que nos données personnelles sont récoltées.

Et les logiciels de nos ordinateurs aussi

Pour récupérer nos données sur les serveurs, plusieurs techniques sont utilisées par certaines grandes sociétés Internet. Facebook, par exemple, offre un service gratuit. Google aussi, mais ils vont plus loin : ils offrent en plus des logiciels gratuits, comme Picasa, « un logiciel pour organiser, retoucher et partager vos photos ». Du coup, les utilisateurs stockent leurs photos sur les serveurs de Google, les partagent avec leurs amis et cela rendra les choses plus compliquées s’ils veulent quitter les différents services de Google à l’avenir. Google offre aussi gratuitement le navigateur Chrome, qui, associé à un compte GMail, collecte toutes sortes d’informations, comme les mots de passe des sites Web, l’historique des pages Web visitées, le texte saisi dans les formulaires, et ainsi de suite. Le document décrivant tout ce que fait Chrome et les données qu’il collecte fait 10 pages que je vais vous laisser déchiffrer.

Et les smartphones aussi

Google procède d’une manière très semblable avec les smartphones. En effet, Google développe le système d’exploitation pour smartphones appelé Android et l’offre gratuitement aux fabricants de téléphones comme Samsung, LG, HTC et à peu près tous les autres sauf Apple. Si vous avez un smartphone, comme 7 Européens de l’ouest sur 10, il y a de grandes chances pour qu’il soit équipé du logiciel Android de Google, qui représente 71,2% des ventes. Apple est deuxième à 21,2%. Le troisième, Windows Phone de Microsoft, est à 6,8%. Les autres se partagent les 0,8% restants.

Si Google offre gratuitement Android à des géants comme Samsung ou LG, ça n’est pas par bonté d’âme, c’est parce qu’ils sont obligés de livrer avec des applications comme Google Maps (qui sait où on se trouve), Google Search (pour savoir ce qu’on cherche et donc de quoi on se préoccupe), et de Google Chrome (voir ci-dessus). Le fait de ne pas avoir à payer Android fait que les fabricants peuvent avoir des prix compétitifs vis-à-vis d’Apple. Mais du coup, Google récolte des quantités phénoménales de données sur chaque utilisateur, sans que celui-ci s’en doute, jusqu’à ce qu’il s’en rende compte comme je le décrivais dans l’introduction de cet ouvrage, avec par exemple Google Location History (traçage des déplacements de l’utilisateur) ou Google Now, qui anticipe vos besoins en information.

En ce sens, les logiciels de Google, d’Android à Chrome sont de véritables chevaux de Troie : ils ressemblent à des cadeaux extraordinaires mais n’existent que pour servir celui qui les ont fabriqués, Google.

Les applications des smartphones aussi

Le piège de la gratuité fonctionne aussi très bien avec les applications pour smartphones. Je n’ai pas eu à chercher longtemps pour trouver une application des plus anodines pour Android, « Brightest Flashlight Free », qui est franchement louche. L’application est pourtant toute simple, puisque qu’elle allume l’écran et le flash de la caméra pour servir de lampe de poche. Et elle affiche des publicités. Pourtant, quand on regarde d’un peu plus près, on en arrive à s’interroger sur les permissions dont elle a besoin :

  • Position du téléphone par GPS et Wifi
  • Accès aux photos et documents stockés dans le téléphone, y compris pour les supprimer
  • Identité du téléphone
  • Accès à Internet

Autrement dit, l’application veut savoir où on se trouve, qui nous sommes, peut lire tous nos documents et les envoyer où elle veut sur Internet. Tout ça pour allumer le flash de la caméra ?

Sachant que ces précision sont affichées avant d’installer l’application, on se dit que toute personne raisonnable refuserait d’installer un espion pareil. Pourtant, l’application a été installée plus de 50 millions de fois.

Quand on sait qu’un smartphone dispose d’une caméra, d’un micro, d’un GPS et de capteurs de mouvement, on imagine la quantité de données qu’il peut capter pour les transmettre, pour peu que l’application soit prévue pour, à des serveurs « dans le Cloud » sur Internet.