Paysage d’Auvergne
C’est arrivé par surprise à la radio, quand Nicolas Hulot a annoncé « Je prends la décision de quitter le gouvernement ».
- Au Medef, le remaniement après le départ de Nicolas Hulot inquiète les patrons, sur l’air de : “avec ce mec plutôt souple, c’était déjà par facile, mais si on tombe sur un vrai écolo, ça va être compliqué de faire du business” (ce qui est possible, voire probable, voire certain) ;
- Pourquoi Nicolas Hulot quitte le gouvernement ;
- Si même Nicolas Hulot n’a pas réussi, qui y parviendra ? ;
- Le bilan de Nicolas Hulot (article datant d’avant la démission) ;
- ‘La démission de Nicolas Hulot est une invitation à changer de cap’ : 10 associations écologistes lancent un appel à Emmanuel Macron ;
- Mise à jour : « Le plus grand défi de l’histoire de l’humanité » : l’appel de 200 personnalités pour sauver la planète ;
- Un point de vue plus radical, qui explique en substance que pour adresser vraiment la question écologique, il faut faire la révolution (ce qui répond à la question du MEDEF posée plus haut). Jean-Baptiste Comby : « La lutte écologique est avant tout une lutte sociale ».
Mais l’article qui m’a le plus intéressé, parce qu’il touche le fond du problème, c’est celui d’Usbek et Rica : Notre « lassitude de l’apocalypse » nous empêche-t-elle de sauver le climat ?. On y trouve une conférence TED dont la transcription est disponible en français.
J’ai (très maladroitement, je le concède) extrait quelques notes de ce TED talk, qui sont autant de source pour comprendre puis agir face à ce sujet.
5 raisons pour lesquelles on n’entend plus les infos concernant le climat
- Distance (le problème est lointain géographiquement ou dans le temps)
- Lassitude de trop de catastrophisme depuis des décennies
- Dissonance
- Déni : je refuse de voir le problème
- Identité : je suis attaché à des valeurs[1] qui vont contre le climat.
5 solutions pour rendre le message plus audible et les progrès en faveur du climat plus socialement acceptables :
- Social : rendre le progrès écologique plus proche des gens pour le rendre contagieux ;
- Supportive, avoir une approche positive des choses faites contre le changement climatique plutôt que de parler de catastrophes à venir ;
- Simple : simplifier l’action par exemple avec des techniques de Nudge ;
- Signal : disposer d’indicateurs qui montrent régulièrement les progrès réalisés au niveau individuel ;
- Story : imaginer un futur excitant compatible avec le respect de la planète.
Mise à jour du 4 septembre : Rugy au poste de Hulot, mais toujours la même politique de Macron . Extrait (l’emphase est de mon fait) :
au-delà de l’organisation de l’Etat, ce qui cloche, ce qui nous mène dans le mur et que les chefs d’État doivent corriger de toute urgence, c’est le modèle économique dominant. Pendant que «la planète est en train de devenir une étuve, que nos ressources naturelles s’épuisent, que la biodiversité fond comme la neige au soleil», Emmanuel Macron, Edouard Philippe comme tous les dirigeants de la planète, pensent croissance, PIB, relance de la consommation… Bref, dixit Hulot, « on s’évertue à entretenir voire à réanimer un modèle économique marchand qui est la cause de tous ces désordres ». Et alors que «l’enjeu écologique est un enjeu culturel, sociétal, civilisationnel, on ne s’est pas du tout mis en ordre de marche pour l’aborder comme cela». […]
Puisqu’il y a fort à parier que la nomination de François de Rugy ce mardi ne signe pas un sursaut écologique à la tête du gouvernement, c’est à la société civile de se réveiller massivement et de peser de tout son poids. Ces dernières années, c’est grâce à elle, à sa pression sur le politique, que les forages de gaz de schiste ne transforment pas l’Hexagone en fromage suisse. Ou que l’usage des insecticides néonicotinoïdes comme de l’herbicide glyphosate a été (certes encore trop peu) freiné. L’unique espoir est là.
Note
[1] Ces valeurs sont très différentes suivant les gens. Ça peut venir de plein de choses, du genre “il faut faire beaucoup d’enfant” à “le shopping me remonte le moral” ou “gagner beaucoup d’argent est signe de réussite sociale” ou “il me faut une voiture plus belle que celle du voisin”, ou “il faut manger de la viande à tous les repas” etc.
7 réactions
1 De athoune - 03/09/2018, 20:50
Les actions de Bayer, Total, la FNSEA ou les chasseurs "premiers écologistes de France" ne sont pas individuelles, pourquoi les progrès devraient être individuels?! C'est un problème de société, pas juste individuel.
C'est mon choix de créer de la croissance pour pas être chomiste, d'habiter trop loin pour compenser les loyers énormes, cramer tout ce courant pour chauffer une maison mal isolé par ce que le proprio s'en fout.
Mais oui, je vais faire ma part : composter, sabrer ma consommation, manger local avec de la viande quelques fois dans le mois, éradiquer le plastique à usage unique, supprimer l'avion et la bagnole, toussa. Apprendre des choses low tech, rencontrer des gens aussi.
2 De cameleon - 03/09/2018, 21:33
il suffit de voir la levée de bouclier qui accompagne chaque hausse des taxes sur le carburant/le gaz pour comprendre que la lutte contre le réchauffement climatique, c'est pas gagné...
3 De fassil - 04/09/2018, 08:51
'LLo,
Ouaip, & la Norvège est la tête de pont face à tous les barils bientôt exploitables sous l'Artique qui rétrécit comme peau de chagrin...
P'tain, il est vraiment temps de trouver une façon d'en parler autrement, parce que l'on a pas encore "le cul sorti des ronces", comme disait l'autre !
4 De fassil - 04/09/2018, 10:30
'LLo again,
& pour en rajouter une couche (au même endroit tiens), ne + trop consommer du portnawak numérique global surtout s'il est cher:
Car si l'on prend par exemple, le meilleur élève (en révolution numérique & avec le système d'exploitation en "isme" de nôtre support aka la planète) du moment, que se passera-t-il donc sans doute pour lui* dans un proche avenir ?
Un porte-container rempli à ras bord d'i"Trucs"X+x empruntant en fin d'été (& donc pile-poil pour la Keynote & Noêl..!) la fameuse route du nord-Ouest autour de l'Artique gagnera les quelques milliers de kilomètres entre Shenzhen (Foxconn) & la Californie (Apple-store) pour avoir un flux toujours + tendu, toussa...**
5 De Thomas SAVARY - 04/09/2018, 15:01
Et si on commençait à parler de la responsabilité de l’Union européenne dans le désastre écologique en cours ?
L’Union européenne, fondamentalement, qu’est-ce que c’est ? Une construction juridique, des traités juridiquement contraignants auxquels sont liés les États membres, à la fois dans le cadre de leurs relations entre eux et dans les politiques qu’ils ont le droit ou l’interdiction de mettre en œuvre. Les traités européens ne se contentent pas de définir le fonctionnement et les pouvoirs respectifs des différentes institutions européennes (Parlement, Commission, Conseil européen, Conseil de l’Union européenne, Banque centrale…), mais ils énoncent dans toute une série de domaines ce que doit être la politique de chacun de ses membres. Imagine-t-on que des politiques prédéfinies soient inscrites en dur dans une Constitution ? Non ? Pourtant, c’est exactement ce qu’il en est s’agissant des traités européens.
La PAC a érigé le productivisme en dogme de l’agriculture subventionnée. Dans ces conditions, comment échapper aux pesticides, aux fermes des mille vaches, etc. ? La concurrence libre et non faussée est inscrite dans les traités, ainsi que l’interdiction du monopole des services publics (donc la mise en concurrence avec le privé). De même l’interdiction du contrôle des mouvements de capitaux, ce qui permet toutes les délocalisations, avec le coût écologique que cela suppose (transport des marchandises). J’ajoute que la Commission européenne, non élue par les citoyens ni même par leurs représentants au Parlement européen, détient le monopole de l’initiative législative, et qu’elle mange dans la main des lobbies (neuf rendez-vous sur dix des commissaires sont avec « des représentants d’intérêts privés »). Le président de la Commission n’est pas responsable devant le Parlement… À ce niveau, ce n’est pas un déficit démocratique, c’est carrément une déclaration de guerre à la démocratie.
Juncker l’a d’ailleurs déclaré en tout franchise, et c’est la vérité nue que peu de gens en France semblent capables d’admettre : « Il ne peut pas y avoir de choix démocratique contre les traités européens. » Qu’on vote Sarkozy, qu’on vote Hollande, qu’on vote Macron, ou même Mélenchon, Le Pen, Lassalle, les politiques fixées par les traités européens s’appliqueront, et sur des sujets aussi essentiels que les services publics, les dépenses publiques, le droit du travail, les retraites, l’immigration, l’agriculture…
Dans le domaine sensible des OGM, il est déjà arrivé que, malgré l’opposition du Parlement et du Conseil (à une voix seulement de la majorité qualifiée), la Commission autorise tout de même les OGM en question.
Le pire, c’est qu’on ne peut pas réformer le Machin, sinon en empilant article sur article. Mais la modification d’un article déjà intégré au traité requiert l’unanimité des présentement vingt-huit États membres (article 48 du traité sur l’Union européenne)… Quand on voit que même sur une simple directive, celle relative au travail détaché, Macron n’a pas obtenu la moitié de ce qu’il annonçait, on peut toujours rêver pour changer les articles existants.
Les Britanniques, en votant pour le Brexit, n’étaient pas fous, bien au contraire…
Sauf bien sûr à ne pas s’être penché encore sérieusement sur les traités européens, je ne comprends pas comment on peut se dire de gauche ou écologiste et refuser d’envisager la sortie de l’Union européenne. Ou même sans être de gauche, il suffit d’être un tant soit peu attaché à la démocratie pour vouloir prendre ses jambes à son cou face à une telle horreur politique. Le beau rêve de la construction européenne qu’on nous a vendu va-t-il faire encore longtemps illusion ? Il est temps de se réveiller.
Après, évidemment, la sortie de l’UE ne garantirait pas un ministère de l’Écologie efficace. Mais c’est la première étape de toute politique libre et souveraine, y compris écologique, donc.
6 De cdg - 05/09/2018, 15:06
@Savary
C est un peu facile de tout mettre sur le dos de l UE. Par ex le productivisme de la PAC a ete concu a une epoque ou l europe voulait pouvoir nourrir sa population (eh oui, dans les annees 60, les decideurs avaient tous vecu des periodes ou il fallait se serrer la ceinture pour de vrai). Mais qui freine pour changer cette politique ?
La France !
Car nos gouvernements ont peur de la FNSEA et n ont pas envie de voir les sous prefectures remplies de purin et autres exactions du meme genre. L etat francais prefere meme payer des amendes plutot que faire respecter les lois (par ex pour les nitrates dans les rivieres)
Pour le reste, l UE est en effet d inspiration liberale. Ce qui d ailleurs correspond a l orientation politique des pays la composant (je crois qu il n y a que la grece et l espagne qui acteullement ne sont pas gouvernes par des liberaux sur le plan economique). Imposer une autre orientation a l UE serait aller contre la volonte des gouvernements (et probablement des electeurs des differnets pays car ceux ci ont voté pour ces gouvernements)
PS:
1) la libre circulation des capitaux n a rien a voir avec les delocalisations. Pas mal d entreprise ont delocalise en chine alors que le gouvernement chinois controlait le cours du yuan et avait un controle des changes. Meme en europe, le principal moteur des delocalisations est l ecart de salaire entre les differents pays. En roumanie vous pouvez payer quelqu un 500 €/mois. En france il faudra le payer plus du double ...
2) les chantres du Brexit poussaient a une GB plus liberale pas moins. Le principal vote pour le Brexit etait d ailleurs pas economique mais contre l immigration et pour pouvoir reprendre le controle du pays sans subir les oukazes de Bruxelles (sur ce point ca a l air mal barre car s ils veulent garder un acces au marche de l UE, les anglais vont devoir garder les reglements de l UE)
7 De Thomas SAVARY - 05/09/2018, 21:32
@cdg
Merci pour ces précisions sur le rôle néfaste de la France dans le cadre de l’UE. J’ajouterai un autre exemple. Alors que l’Allemagne dans les années 1970 souhaitait que le futur Parlement européen fût un vrai parlement (et non la parodie impotente qu’il est aujourd’hui), qui a freiné des quatre fers du temps de la CEE ? La France ! Bref, notre pays porte une part de responsabilité dans le fonctionnement antidémocratique de l’UE. Cela dit, les bases dictatoriales en avaient été jetées par un Allemand, le premier président de la Commission européenne et cosignataire pour l’Allemagne avec Adenauer du traité de Rome en 1957, Walter Hallstein. C’est apparemment à lui en grande partie que l’on doit la conception d’un organe cumulant le monopole de l’initiative législative et l’exécutif — une horreur qui aurait fait s’étouffer Montesquieu. Au début, les compétences de la Commission étaient très limitées et ne portaient que sur des points perçus comme secondaires, mais elle n’a cessé de voir s’étendre son champ d’action. Dans son livre testament, « l’Europe inachevée », M. Hallstein se réjouit des transferts de souveraineté à la Commission opérés par les États membres, en appelant de ses vœux la poursuite de ces transferts. Il faut lire aussi la manière très satisfaite dont le bonhomme présente cette belle institution non élue. À vomir…
Alors, non, bien sûr, il ne s’agit pas pour autant de tout mettre sur le dos de l’UE. Ce que je voulais dire, c’est que notre appartenance à l’UE, dans bien des domaines, interdit de mener une politique écologique, et qu’il est vain d’espérer un changement significatif des articles déjà adoptés.
Je maintiens par ailleurs que la libre circulation des capitaux a à voir, indirectement, avec les délocalisations. Avant, pour réaliser les investissements nécessaires à la création d’une usine à l’étranger, les entreprises françaises devaient obtenir l’autorisation de l’État. C’était d’ailleurs un peu pareil pour les particuliers. Lorsqu’on se rendait à l’étranger, on n’avait pas le droit de sortir plus d’une somme donnée. Je me souviens d’ailleurs de mon père budgétant un voyage familial au Royaume-Uni, en 1983.
Par ailleurs, quand une société étrangère rachète une entreprise française, le résultat est généralement la fermeture de plusieurs sites. Et les employés qui ne sont pas purement et simplement mis à la porte sont invités à se « délocaliser » pour garder leur emploi, mais en Bulgarie, par exemple. Et si un employeur français peut faire travailler ad libitum des travailleurs étrangers moins coûteux, c’est justement parce qu’il n’y a plus de contrôle possible (permis) des mouvements de capitaux.
Qui sont « les » chantres du Brexit ? Il y en avait aussi pas mal chez les travaillistes (voir le film « Lexit » sur Youtube) — et c’est normal, vu que l’Union européenne ne permet pas une politique de gauche. Quant aux réalisateurs du film « Brexit, the Movie » (dont les sympathies semblent pencher à droite, vu les personnes interviewées), ils n’abordent à aucun moment le sujet de l’immigration. Je ne dis pas que ça n’a pas été un sujet récurrent dans les débats, mais beaucoup de brexiters n’en ont en réalité jamais parlé, tout simplement parce qu’il y a des choses bien plus importantes : récupérer sa souveraineté, sans laquelle il n’est pas de démocratie, sans laquelle aucune politique indépendante n’est possible, sans laquelle les élections nationales n’ont plus aucun sens. Pourquoi dès lors s’embarrasser de sujets polémiques et diviseurs comme l’immigration ?