"Bicing" shared bicycles

Système 'Bicing' de mutualisation de bicyclettes à Barcelone

En rentrant de Madrid, je tombe sur deux journaux. Courts extraits :

Le Figaro du 21/5/2008, cahier Entreprises, page 21

Après avoir concentré leurs actions sur le blocage des ports, les pêcheurs, en colère face à l'envolée du prix du gazole, s'en prennent depuis lundi soir aux dépôts de carburant afin de créer les conditions de la pénurie. (...) Déjà, en fin de journée, des consommateurs paniqués par les risques de rupture de stock prenaient d'assaut des stations service à La Rochelle. Plusieurs hypermarchés de la région de Montpellier étaient déjà en rupture de stock her soir. A ce jour, les forces de l'ordre ne sont pas intervenues pour obtenir la levée des barrages.

Le pris du baril de pétrole frise les 130 dollars. (..) la crise s'aggrave en France et rien ne semble pouvoir arrêter la flambée des cours du pétrole et du gazole. Un véritable choc pétrolier menace, à la veille des vacances. Hier à New York, le cours du baril, qui a franchit la bare des 129,50 dollars, se lançait à l'assaut du seuil des 130 dollars, après avoir battu plusieurs fois le record historique dans l'après-midi.

La Tribune du 21/05/2008, éditorial d'Erik Israelewicz, page 3

La mobilisation des marins-pêcheurs a quelque chose de pathétique. (...) Qu'une nouvelle fois ils se retournent vers l'état, qu'ils en appellent à son aide, il n'y a à cela rien de surprenant. (...) Même s'ils refusent de le reconnaître, les pêcheurs français ont pourtant dans la situation qui est la leur une part de responsabilité. La profession s'est certes restructurée (...) elle ne s'est pourtant pas adaptée suffisament vite à la tempête qui agite son environnement ) de nouvelles concurrences, un risque dépuisement des ressources halieutiques, la hausse surtout du prix de l'énergie. Elle est restée trop longtemps attachée par exemple à l'usage de chalutiers, très gourmands en carburant, là où elle aurait pu développer une flotte plus économe en gazole. (...) L'État a lui aussi sa part dans la crise. (...) Le risque, c'est d'ouvrir la boite de Pandore, c'est de créer un précédent dangereux, c'est d'inciter toutes les professions affectées par la flambée du brut - les transporteurs routiers, les taxis, les agriculteurs, etc. - à venir tendre leur sébile auprès de l'État. C'est de pousser les consommateurs eux-mêmes, nous tous en réalité, à revendiquer des aides. Le pétrole est cher, ses dérivés aussi. On nous a assez dit qu'il était destiné à le rester. Il vaut mieux s'organiser, immédiatement, sous cette contrainte, réduire donc notre indépendance à son égardplutôt que de rechercher des solutions provisoires, nécessairement insuffisantes. Les aides d'urgence sont souvent un dangereux traitement. Elles allègent peut-être dans l'instant la douleur, elles n'en suppriment jamais les causes.

En gros, tout le monde va devoir faire face à l'explosion du du prix du pétrole. Nous, consommateurs, ne sommes pas différents des pêcheurs. Ils sont juste un peu en avance de phase, c'est tout. Dans les 10 à 30 ans à venir, il va falloir repenser notre société, notre approche de la consommation (ou devrais-je écrire la consummation ?). Il va falloir repenser notre façon de nous déplacer, de consommer des articles jetables, de boire de l'eau en bouteille, de jeter des objets qui sont en fait réparables ou simplement démodés, et même notre façon d'habiter loin de notre lieu de travail...

J'ai coutume de demander à mes interlocuteurs, pour qu'ils prennent conscience de l'importance du Web et d'Internet, d'imaginer 24 heures de leur vie sans accès Internet. On pourrait se poser la même question : que ferions-nous si aucune consommation de pétrole, de ses produits et services dérivés, n'était possible sur une durée d'un mois (ou possible à un prix exorbitant) ? Qu'est-ce que ça changerait pour nous ? Quelques pistes :

  • quels impacts sur le tourisme de masse ? (et les revenus pour la France, première destination touristique mondiale)
  • quels impacts sur notre capacité à aller travailler ? Comment réorganiser les villes pour réduire les distances domicile-travail au point qu'on puisse les faire à pied ou à vélo ?
  • quels impacts sur notre consommation quand le circuit de distribution n'existe plus, avec des lieux de production (Chine) de plus en plus éloignés des lieux de consommation ?
  • Quels impacts sur l'emploi, alors qu'il va falloir se remettre à produire localement, alors que l'outil de production a souvent été démantelé ?
  • Quels impacts sur notre façon de nous alimenter ? (Finies les bananes bon marché, les légumes hors saison cultivés sous serre chauffée)
  • Quels impacts sur les types d'emballage utilisés pour conserver ce qu'on consomme, emballages majoritairement issus du pétrole ?
  • Quels impacts pour l'industrie automobile ?
  • Quels impacts pour les agriculteurs et leur métier ? Les chauffeurs de taxi ?

Et toi ami lecteur, que penses-tu de ta vie avec un pétrole à 300$ le baril ?

Mise à jour : le courage politique aura manqué une fois de plus : Après les pêcheurs, la "France qui se lève tôt" réclame son dû. Extrait :

(les) représentants de la profession (de la pêche) ont retenu un message clair : pour eux le litre de gazole coûtera 40 centimes d'euros et non pas 70. Le risque dès lors existe que toutes les autres victimes de la hausse du prix du gazole – l'agriculteur, le chauffeur routier et d'une façon plus générale l'automobiliste – se disent qu'après tout, elles aussi font partie de "la France qui souffre". A charge pour l'Etat de soulager leur douleur. Les routiers sont déjà montés au créneau. A qui le tour ?