J'ai eu l'occasion d'expliquer à plusieurs reprises tout le mal que je pense de la loi LOPPSI, mais rien ne vaut l'hypertexte pour être didactique, ne serait-ce que parce que c'est du texte - on peut donc relire si on le souhaite - mais aussi et surtout parce qu'on peut cliquer sur les liens menant aux sources. C'est en lisant le site de l'indispensable Quadrature du Net que je suis tombé sur l'argumentaire le plus succinct et pédagogique qu'il m'ait été donné de voir jusqu'à présent.

Voici donc pourquoi le filtrage du Net institué par l'article 4 de la loi LOPPSI est inefficace est dangereux :

  • inadapté : Le filtrage du Net est techniquement inadapté aux réalités technologiques : il ne concerne pas les dispositifs par lesquels les contenus pédopornographiques sont réellement échangés, il est aisément contournable, et pourrait se révéler contre-productif ;
  • inefficace : seule une augmentation des moyens humains et financiers des enquêteurs, ainsi qu'un renforcement de la coopération internationale seraient à même de lutter contre la pédopornographie en faisant retirer les contenus des serveurs et en arrêtant ceux qui les distribuent ou les produisent ;
  • disproportionné : Le risque de surblocage - censure collatérale de sites parfaitement légaux - est inévitable, entraînant de graves atteintes à la liberté de communication.

Sur ce dernier point, il faut savoir qu'il y a des précédents, dont celui de l'Australie, la liste secrète des sites censurés a été publiée. La moitié n'avait rien à voir avec de la pédopornographie. on y trouvait des sites pornographiques (non pédophiles), des sites religieux, des vidéos Youtube, des sites de jeux en ligne, un tour operator et même un dentiste ! (Source : Sydney Morning Herald).

C'est un grand classique de la manœuvre politicienne : on met en place un mécanisme de censure sous prétexte de protéger la société contre la un danger très fédérateur, dans ce cas la pédopornographie. Comme le sujet est scandaleux, il est hors de question de publier la liste des sites censurés (évidemment, ça serait leur faire de la publicité), on autorise donc une administration (plutôt que la justice) à décider qui doit être censuré. Et une fois que le mécanisme est en place, il est facile de l'appliquer à d'autres sujets gênants[1] qui n'ont rien à voir avec le problème de départ, à savoir la pédopornographie.

C'est pour ce genre de travail à la fois de lobbying citoyen (et de pédagogie envers les citoyens et les politiques) qu'il faut soutenir financièrement la Quadrature du Net comme je l'ai fait récemment et faire passer le message autour de vous.

Mise à jour : il n'aura pas fallu attendre bien longtemps après la publication de cet article pour qu'une nouvelle occurence de censure abusive soit dévoilé, cette fois-ci aux USA : 84 000 sites bloqués par erreur dans la lutte contre la pédo-pornographie.

Notes

[1] genre le crime de lèse majesté en Thaïlande qui censure 1200 sites, dont des vidéos de Charlie Chaplin !