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mardi 15 février 2011

LOPPSI est dangereuse pour 3 raisons

J'ai eu l'occasion d'expliquer à plusieurs reprises tout le mal que je pense de la loi LOPPSI, mais rien ne vaut l'hypertexte pour être didactique, ne serait-ce que parce que c'est du texte - on peut donc relire si on le souhaite - mais aussi et surtout parce qu'on peut cliquer sur les liens menant aux sources. C'est en lisant le site de l'indispensable Quadrature du Net que je suis tombé sur l'argumentaire le plus succinct et pédagogique qu'il m'ait été donné de voir jusqu'à présent.

Voici donc pourquoi le filtrage du Net institué par l'article 4 de la loi LOPPSI est inefficace est dangereux :

  • inadapté : Le filtrage du Net est techniquement inadapté aux réalités technologiques : il ne concerne pas les dispositifs par lesquels les contenus pédopornographiques sont réellement échangés, il est aisément contournable, et pourrait se révéler contre-productif ;
  • inefficace : seule une augmentation des moyens humains et financiers des enquêteurs, ainsi qu'un renforcement de la coopération internationale seraient à même de lutter contre la pédopornographie en faisant retirer les contenus des serveurs et en arrêtant ceux qui les distribuent ou les produisent ;
  • disproportionné : Le risque de surblocage - censure collatérale de sites parfaitement légaux - est inévitable, entraînant de graves atteintes à la liberté de communication.

Sur ce dernier point, il faut savoir qu'il y a des précédents, dont celui de l'Australie, la liste secrète des sites censurés a été publiée. La moitié n'avait rien à voir avec de la pédopornographie. on y trouvait des sites pornographiques (non pédophiles), des sites religieux, des vidéos Youtube, des sites de jeux en ligne, un tour operator et même un dentiste ! (Source : Sydney Morning Herald).

C'est un grand classique de la manœuvre politicienne : on met en place un mécanisme de censure sous prétexte de protéger la société contre la un danger très fédérateur, dans ce cas la pédopornographie. Comme le sujet est scandaleux, il est hors de question de publier la liste des sites censurés (évidemment, ça serait leur faire de la publicité), on autorise donc une administration (plutôt que la justice) à décider qui doit être censuré. Et une fois que le mécanisme est en place, il est facile de l'appliquer à d'autres sujets gênants[1] qui n'ont rien à voir avec le problème de départ, à savoir la pédopornographie.

C'est pour ce genre de travail à la fois de lobbying citoyen (et de pédagogie envers les citoyens et les politiques) qu'il faut soutenir financièrement la Quadrature du Net comme je l'ai fait récemment et faire passer le message autour de vous.

Mise à jour : il n'aura pas fallu attendre bien longtemps après la publication de cet article pour qu'une nouvelle occurence de censure abusive soit dévoilé, cette fois-ci aux USA : 84 000 sites bloqués par erreur dans la lutte contre la pédo-pornographie.

Notes

[1] genre le crime de lèse majesté en Thaïlande qui censure 1200 sites, dont des vidéos de Charlie Chaplin !

jeudi 10 février 2011

Loppsi adoptée

Internet est surveillé, contrôlé, censuré - affiche par RSF.org

affiche de RSF.org

La redoutable loi Loppsi vient donc d'être adoptée. Elle est redoutable car elle ouvre la porte au filtrage des sites par une autorité administrative. Autrement dit, une administration va pouvoir décider sans décision de justice de censurer un site Web. C'est un immense pas en arrière en terme de liberté d'expression. Je laisse au député Jean-Jacques Urvoas le d'expliquer cela (c'est un extrait des débats parlementaires) :

À l'article 4, parmi les techniques que vous entendez utiliser pour lutter contre la pédopornographie, figure le filtrage des sites. Nous partageons évidemment vos motivations mais le cocktail que vous proposez nous paraît explosif [...] Je crains que [la lutte contre la pédopornographie] ne soit un prétexte fallacieux, d'autant, les techniciens nous l'expliquent, qu'il ne sera pas compliqué de contourner le blocage. Dans les deux pays qui ont légiféré pour bloquer des sites, l'Australie et la Finlande, l'inutilité de la mesure a malheureusement été démontrée. La liste sera secrète et arrêtée par le ministère de l'intérieur, comme en Finlande. Or, dans ce pays, elle a en réalité été publiée rapidement et elle comportait une longue liste d'opposants à ce projet mais n'ayant rien à voir avec la pédopornographie. Le même phénomène a été constaté en Australie : sur la liste interdite par le Gouvernement, figuraient des sites de poker, des vidéos publiées sur YouTube, des pages de Wikipedia, des sites sur l'euthanasie ou anti-avortement. Les décisions seront prises à la discrétion du ministère de l'intérieur, sans contrôle d'une autorité judiciaire [...] cela revient, ni plus ni moins, à légiférer en faveur de l'arbitraire. C'est d'autant plus dommage qu'existent d'autres solutions ne présentant pas ces inconvénients, tout aussi aisées à mettre en œuvre mais plus respectueuses des libertés.

L'espoir qui reste, c'est que le Conseil Constitutionnel bloque la loi dans son état actuel. C'est d'autant plus inquiétant que la lutte contre la pédo-pornographie n'est qu'un prétexte pour le filtrage et le contrôle d'Internet, comme le souligne Jérémie Zimmerman, porte-parole de la Quadrature du Net :

Le contrôle du Net est à l'ordre du jour du G8 et du G20 présidés par Nicolas Sarkozy, au travers de la notion d'un “Internet civilisé”. Dans ce contexte, il est extrêmement inquiétant de voir le Parlement imposer le filtrage administratif d'Internet. Au même titre que l'HADOPI instrumentalise les artistes et élude la question du financement de la création à l'ère numérique, le blocage de l'accès aux sites ne règle absolument rien au problème de la pédopornographie. Le cheval de Troie de la protection de l'enfance ouvre la porte, par ce vote, à la censure généralisée du Net.[1] Les citoyens épris d'Internet et de libertés doivent agir et dénoncer cette instrumentalisation.

C'est pourquoi j'encourage les lecteurs du Standblog à soutenir la Quadrature du Net, comme je viens de le faire moi même avec un don de 100€.

Lectures complémentaires :

Notes

[1] Le président Sarkozy a déja promis le filtrage aux industries du divertissement: « Plus on pourra dépolluer automatiquement les réseaux et les serveurs de toutes les sources de piratage, moins il sera nécessaire de recourir à des mesures pesant sur les internautes. […] Il faut donc expérimenter sans délai les dispositifs de filtrage. » (Vœux au monde de la culture du Président de la République, 7 janvier 2010, format PDF).

jeudi 23 décembre 2010

Filtrage et pédophilie

Affiche de RSF.org contre le filtrage d'Internet et pour la liberté de la presse

La loi LOPPSI 2 et son infâme article 4 sont donc passés. Ils décrètent le filtrage d'Internet. Juste à ce moment là, je découvre une affiche de Reporters Sans Frontières (association qui se bat pour la liberté de la presse) dans la rue. Elle titre très justement "Aujourd'hui encore, dans plus de 20 pays, Internet est surveillé, contrôlé, censuré". Il est vraiment déprimant de voir la France, prétendument "pays des droits de l'homme", officiellement filtrer et censurer Internet.

En effet, je pense que la pédophilie - ignominie s'il en est - n'est qu'un prétexte pour une reprise en main d'Internet par des politiques qui se sentent dépassés par les événements. A ce sujet, je vous encourage à lire Loppsi 2 article 4, un très bon papier de Zythom (expert judiciaire). Trouvé via Embruns.net.

A lire aussi :

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