C'est la fin de l'année, et donc l'occasion d'en faire le bilan. C'est ce que je vous propose sur le thème du Web, de ses standards et des navigateurs. J'ai divisé ce bilan en trois points : l'évolution du marché des navigateurs, la montée en puissance de HTML 5 et l'apparition du modèle App Store.

Renforcement de la concurrence au niveau des navigateurs

  • Google Chrome en version 1.0 pour Windows en décembre 2008
  • Parts de marché de Firefox en constante augmentation (saisonnalité : on a toujours un plateau pendant l'été avec une forte augmentation en octobre novembre). Firefox a maintenant 350 millions d'utilisateurs actifs.
  • Baisse d'Internet Explorer toutes versions confondues
  • Sortie d'Internet Explorer 8, qui provoque la baisse d'Internet Explorer 7.
  • IE 6 résiste encore trop et plombe les services Web qui pourraient être beaucoup plus innovants sans lui.
  • Augmentation de la fréquence de sortie des nouvelles versions chez Mozilla (20 mois entre Firefox 2.0 et 3.0, 12 mois entre 3.0 et 3.5, 7 mois entre 3.5 et 3.6)
  • Arrivée des extensions dans Chrome 4 Beta fin novembre
  • Sortie de Chrome pour Linux et Mac OS X en version finale fin novembre 2009.
  • Chrome dépasse Safari en parts de marché et se retrouve donc troisième derrière Firefox et Internet Explorer.

L'actualité de l'année, c'est la montée en puissance des navigateurs modernes, sous la pression des libres, Firefox et Chrome[1]. Microsoft mène toujours en terme de parts de marché toutes versions confondues, mais Firefox se retrouve dominant dans plusieurs pays, dont l'Allemagne.

HTML 5 : maturation et visibilité

Au niveau technique, HTML 5 et CSS3, ainsi que plusieurs APIs et spécifications associées ont bien avancé à la fois sur le papier et au niveau d'implémentations intéropérables dans les navigateurs modernes. En voici un petit résumé, forcément incomplet :

Ce qu'il faut retenir de cela, c'est que les applications Web sont en train de monter en puissance. De plus en plus de possibilités sont offertes aux développeurs Web, ce qui fait qu'ils ne sont plus obligés de se tourner vers les applications natives.

Pour ceux que ça intéresse, mon collègue Paul Rouget (@PaulRouget) a publié plusieurs démonstrations de ces nouvelles technologies sur le blog Mozilla Hacks (@MozHacks).

On notera que les navigateurs modernes tels que Safari, Chrome et Firefox disposent chacun d'un moteur JavaScript qui est beaucoup plus rapide, du fait de l'adoption de la compilation juste à temps[2]. Ceci, combiné à la montée en puissance de HTML 5, permet au Web ouvert de gagner en crédibilité en tant que concurrent des technologies propriétaires comme Adobe Flash et Microsoft Silverlight[3]

Succès des App Store

Alors qu'Internet arrive sur les mobiles et que ces derniers sont de plus en plus utilisés pour se connecter, un phénomène nouveau est arrivé : les App Store, ces magasins en ligne qui permettent de télécharger de nouvelles applications (gratuites ou pas) pour les téléphones mobiles haut de gamme. Apple revendique ainsi 2 milliards de téléchargements pour 100'000 applications disponibles et 50 millions d'iPhone en circulation à ce moment là.

l'App Store d'Apple est à l'opposé des principes du logiciel libre et du Web ouvert :

  1. L'installation des logiciels ne peut se faire que depuis l'App Store. Le développeur doit payer Apple pour pouvoir utiliser le kit de développement et n'a pas le droit de diffuser lui même son application et signe plusieurs contrats et NDA (contrats de confidentialité). Il est du coup impensable de diffuser le code source du logiciel, sachant que l'utilisateur ne pourra pas l'installer lui même sur son iPhone.
  2. Apple a le contrôle total de ce qui est autorisé ou pas sur l'App Store, et peut refuser une application sans avoir à se justifier.[4]

Le succès de l'App Store d'Apple auprès des utilisateurs le positionne en concurrence des applications Web, car celles-ci sont pour l'instant moins ergonomiques que les applications natives et elles ne peuvent pas accéder à certains composants du téléphone comme le GPS, l'appareil photo et l'accélérometre. HTML 5 prévoit un certain nombre de solutions pour accéder à ces périphériques, via par exemple l'API Geolocation.

D'un point de vue financier, l'App Store se différencie du Web par le fait qu'il offre un modèle de rémunération aux développeurs, autre que la publicité. Toutefois, il semblerait que la perspective de rémunération mise en avant par les App Stores soit grandement exagérée. Ainsi, une équipe française a récemment démontré qu'une application raisonnablement réussie se révélait très déficitaire (3000 à 4000 EUR d'investissement pour 660 EUR de recettes).

Conclusion

2009 a été une excellente année du point de vue des standards et des navigateurs. En effet, les deux ont fait d'immenses progrès aux dépens des navigateurs obsolètes tels qu'IE 6 et IE7, ainsi que les technologies propriétaires telles que Flash. Par contre, une technologie concurrente s'est établie entre temps, celle des App Store, sous l'impulsion d'Apple, qui est suivi par d'autres acteurs du mobile, dont Palm (Palm WebOS Applications) et Android (Marketplace), avec des règles semble-t-il moins strictes.

Notes

[1] Chrome n'est en fait pas libre, mais est basé sur une base de code — Chromium — qui l'est.

[2] Opera 10.5, sorti fin décembre 2009 en pré-Alpha, dispose d'un moteur JavaScript comparable appelé Carakan.

[3] Ces deux technologies ne font pas partie de l'Open Web. Leurs applications sont certes diffusées via le protocole HTTP et s'affichent dans le navigateur, mais elles nécessitent l'installation d'un plug-in propriétaire sans lequel on ne peut pas faire tourner ces applications.

[4] C'est la raison pour laquelle il n'est pas possible de disposer d'une version de Firefox pour l'iPhone. Apple refuse les applications qui dupliquent des fonctionnalités existantes dans le téléphone tel qu'il est livré par Apple.