Dans un billet intitulé Loi, numérisation et histoire, l'ami Luc Saint-Elie pose les questions qui fâchent, en l'occurrence la pérennité des données numériques et surtout les oeuvres numérisées, qui vont survivre bien au delà de la durée du support. Voici un extrait assez largement caviardé pour se focaliser sur l'essence du texte (que Luc me précise, je suis à sa disposition pour retablir les passages supprimés s'il le désire) :

Contrairement à ce que semblent croire les défenseurs de ce projet de loi (...), les données numériques ne sont pas des éléments fixes mais des éléments nomades, destinés à errer de support à support jusqu'au jour (que je ne verrais probablement pas) ou la notion de stockage aura disparu parce que les réseaux ou quelque entité qui leur succédera intègreront la pérennité de ces données dans leur fonctionnement.

La musique ça n'est pas qu'une marchandise c'est aussi un héritage culturel personnel. J'ai dans ma cave de vieux disques qui appartenaient à mon père, j'ai dans mes étagères des bouquins qui appartenaient à mes grands parents. Mes petits-enfants, nos petits-enfants ne sauront pas à quoi nous ressemblions (parce que le jour ou. peut-être se poseront-ils la question, les quelques fichiers numériques sur lesquels nous avons un jour figuré auront été perdu mille fois dans divers plantages). Nos petits-enfants donc ne sauront pas à quoi nous ressemblons, il serait regrettable, ais-je la faiblesse de penser, de leur interdire également l'accès à notre musique, à notre littérature et à notre cinéma. (...)

Aux termes de ce projet de loi, les bouquinistes de quartier sont des voleurs, les marchands de disques d'occasion d'infâmes pirates, les cinémathèques des repaires de terroristes. Les objets qu'ils vendent ont 10, 20, 50 ans voire plus pour les livres. L'informatique en a à peine une vingtaine et déjà des palanquées de données sont difficiles à lire (essayez de trouver un lecteur Syquest, le Syquest était le support de stockage standard dans la PAO dans les années 90) et ça sans verrouillage informatique, imaginez ce qu'il en serait si ces données difficilement lisibles parce qu'elles n'ont pas bénéficié d'une migration régulière de support, était verrouillées par des dispositifs créés il y a dix ou vingt ans par des éditeurs aujourd'hui disparus, verrous ouvrables sur des machines obsolètes et perdues dans les limbes de l'histoire du bit.

Dans le même genre, on notera que Mozilla Europe a co-signé le communiqué de presse de l'AFUL, Aux députés qui défendent la création, les créateurs et le public contre la monopolisation de la culture.