J'ai récemment réalisé un essai sur plusieurs milliers de kilomètres d'une Harley Electra Glide. Voici quelques notes à ce sujet, histoire de meubler une catégorie Moto du Standblog quasiment vide (7 articles en 4 ans !)...

Mise à jour : j'ai publié une vidéo de la Harley-Davidson Eletra Glide Ultra Classic.

Harley-Davidson Electra Glide Ultra Classic

La bête

Un monstre !

L'Electra Glide Ultra Classic, chez Harley, c'est un peu le vaisseau amiral, la moto de tous les superlatifs (rien que son nom le laisse supposer):

  • plus de 400 kg en état de marche
  • Moteur Twin Cam 96 de 1584 cc de cylindrée
  • sacoches et top-case d'origine (chez Harley, on dit Tour Pak)
  • "moto-radio" 4 hauts-parleurs avec lecteur de CD Harman-Kardon
  • Boite 6 vitesses et régulateur de vitesse cruise control
  • Carénage intégral

Elle a pour concurrentes la Honda 1800 GoldWing et la BMW K1200 LT. Chez Harley, l'Electra Glide Ultra Classic est la chef de file de la gamme touring.

Harley Davidson Electra Glide Ultra Classic, vue de face. On peut aussi la voir de derrière.

Premier contact

La bête est impressionnante, c'est sûr ! Je l'enfourche, la selle est basse, mais pour la redresser, il faut de la poigne. Il suffit d'avoir un porte-clé spécial sur soi pour désactiver l'alarme. Je tourne le gros interrupteur sur Ignition pour mettre le contact, un coup de démarreur, et hop, le gros (l'énorme) twin' s'ébroue dans une relative discrétion. Il faut dire que la machine est équipée des pots homologués en France. J'enclenche la première (Klonk !) et c'est parti. Dès les premiers tours de roues, on oublie le poids du monstre, et c'est parti ! La position est sympa, pieds bien à plat sur les plates-formes, guidon qui tombe bien sous les mains, commodos'' avec des boutons partout (radio / CD / CB oblige), leviers de grande taille qui conviennent bien à mes paluches d'ours.

En ville

L'équilibre est excellent. Vu la largeur et le prix du bestiau, on hésite à faire l'andouille, et pourtant, ça serait envisageable, tellement on a l'impression d'être sur un vélo. Le bruit réduit évite limite la pollution sonore, et c'est bien. Seul gros point noir : la chaleur qui se dégage du moteur au niveau du cylindre arrière. C'est pénible pour le pilote, mais ça devient carrément intenable pour le passager, surtout quand la température ambiante est élevée. Je suis à peu près persuadé que c'est du à un réglage très pauvre de l'injection en vue de passer l'homologation. Il paraît qu'une nouvelle cartographie d'injection, offerte tant que la moto est sous garantie, permet de réduire ce problème, mais je suppute que c'est au prix d'une consommation augmentée et d'une non-conformité à la norme anti-pollution...

Emporter des bagages

C'est la grande force de l'Electra Glide : elle permet de partir avec armes et bagages. Les deux sacoches sont raisonnablement grandes (pas au point de pouvoir y mettre un casque homologué, toutefois) et j'ai eu le droit aux sacs sur-mesure adaptés aux sacoches. Très pratique ! Le Tour-Pak contient lui deux casques sans problème et ferme à clé. L'intérieur est recouvert de moquette. Il est très moche à mon avis, mais son coté pratique rachète presque le déficit esthétique ! On dispose en plus de vides poches à l'avant, devant les tibias. Ils sont toutefois mal fichus : ils contiennent peu et le système de fermeture est indigne de la machine. Roulant en solo, je sangle un sac polochon à la place du passager. J'aurais aussi pu accrocher un petit sac sur une grille située sur le Tour-Pak, au dépend de l'aérodynamique et de l'équilibre général.

Sur la route

La machine est chargée, j'ai inséré dans le lecteur un CD gravé pour l'occasion, et c'est parti ! La première mauvaise surprise arrive au premier rond point, alors que frotte la béquille. La surprise fait que ma trajectoire n'est pas très orthodoxe. Ca le fera par la suite à chaque rond point et chaque épingle à gauche. On finit par s'y faire, voire même à attendre que cela arrive ! A la fin du voyage, l'ergot de béquille est très usé et j'ai du le tordre un peu : ça devient de plus en plus difficile de faire frotter. En ligne droite, rien à redire, ça accélère de façon moelleuse, sur le couple, et on sent que le moteur, malgré sa puissance faible pour une telle cylindrée, est de bonne composition, très coupleux et volontaire. Je vous parlerais volontiers de "Force tranquille" pour évoquer ce moteur, mais c'est déjà pris ;-) .

Coté sono, c'est Byzance ! Tant qu'on roule en dessous de 110km/h, le son est bon. En fait, il est excellent jusqu'à 90km/h et acceptable jusqu'à 110. Au delà, c'est toujours distrayant, mais il vaut mieux écouter du heavy metal que du classique si on veut reconnaître la mélodie :-) . Il n'en reste pas moins que c'est la première fois que j'ai la musique sur une moto et franchement, c'est une révélation : conjuguée avec le confort de la selle, c'est l'arme ultime pour abattre des bornes par centaines, y compris pour le passager, qui dispose d'un véritable fauteuil et d'une paire d'enceintes.

Tableau de bord de l'Electra Glide Ultra Classic

Tableau de bord

La jauge à essence laisse même entendre qu'on va pouvoir dépasser les 300km sans s'arrêter, mais une fois la moitié de la jauge atteinte, elle descend très très vite, ce qui rend difficile l'estimation de l'autonomie effective. J'ai pour ma part testé le modele 2007, mais il apparaît que les modèles 2008 et postérieurs disposent d'un réservoir plus grand de presque 4L, ce qui augmente l'autonomie, surtout si on roule calmement en 6ème (seulement sur autoroute, car l'overdrive est inutilisable en dessous de 130km/h à moins de vouloir faire souffrir l'embiellage. Le problème semble résolu avec le modèle 2009, tout juste annoncé, avec un rapport de boite plus court.

Le confort, pour sa part, est excellent. La selle n'appelle aucune critique (sauf après la pluie, où les coutures rendent de l'eau) en terme de confort. Les jambes sont protégées, le buste aussi, le casque n'a que peu de turbulences pour mon mètre 85 (sauf si j'ai la visière ouverte). L'ergonomie des commandes n'appelle pas de commentaires particuliers pour moi, mais ça pourrait être différent pour qui a des mains plus petites (poignées de fort diamètre, gros leviers). Le levier double branche pour les vitesses est franc, sauf pour retrouver le point mort quand le moteur est très chaud (c'est alors rageant, surtout quand on a très envie de pouvoir passer au point mort alors que le moteur chauffe les cuisses).

En ce qui concerne les freins, c'est plutôt décevant sans être catastrophique. Il faut dire que je ne suis pas léger, et que la moto est très lourde. L'ergonomie est bonne, mais la puissance manque un peu.

En montagne

Même si l'Electra Glide est surtout faite pour les grands espaces américains, il se trouve que mon terrain de prédilection, c'est plutôt la départementale de montagne. J'y ai donc emmené cette Ultra Classic ! Bon, une chose est sûre, la béquille frotte encore plus !

La béquille en fin de parcours

La béquille en fin de parcours

Sinon, le couple du moteur permet de s'extraire des virages tranquillement, en souplesse, alors qu'il convient de rentrer dans ces mêmes virages avec prudence... Vu le poids de l'engin, la marge d'improvisation est forcément limitée quand on tombe sur une plaque de graviers !

En approchant de Serre-Ponçon

En approchant de Serre-Ponçon

L'Electra-Glide en statique

Une des qualités de cette moto, et c'est valable pour tous les modèles de forte cylindrée chez Harley, c'est le niveau de finition. On constate aisément qu'ils ne chipotent pas au niveau de la qualité des matériaux. Evidemment, ça se ressent sur le prix (plus de 26 000 EUR pour l'Electra-Glide Ultra Classic) et sur le poids (plus de 400kg). Mais une fois qu'on est passé outre ces deux (grosses) difficultés, on a une machine d'exception...

Inscription Ultra-Classic, sur le garde-boue

Ultra-Classic, sur le garde-boue

Conclusion

Avec cette machine très confortable, véritable auditorium à roulettes, on est bien loin de l'image du rebelle en Harley. On est ici dans le domaine de la berline à deux roues, du véhicule de luxe. Mais cette machine se révèle particulièrement efficace pour rouler loin, avec discrétion (au moins d'un point de vue sonore), avec un caractère qui ne pousse pas au crime, ce qui permet donc rouler sans perdre ses points... On pourrait s'attendre à un bruit plus agressif, plus conformem à l'idée qu'on s'en fait en entendant d'autres Harley. On y gagnerait très probablement en puissance (pas forcément nécessaire) ce qu'on perdrait en confort sonore : le faible bruit des pots contribue à l'absence de fatigue. J'ai par exemple pu faire plus de 900km en deux jours essentiellement par des petites routes, avec armes et bagages, sans avoir les oreilles en capilotade, la tête comme un canon ni le postérieur endolori, et je crois que peu de de motos de caractère peuvent s'enorgueillir de cette performance.

Auto-portrait dans le rétroviseur de l'Electra Glide Ultra Classic

En remontant par les Alpes

J'ai aimé

  • La qualité perçue : tout respire le haut de gamme, la solidité... C'est cher, mais on sait pourquoi ! On notera que Moto Mag a fait un test longue durée d'une Electra Glide, et que le moteur est comme neuf après 50 000 km) ;
  • L'alarme à transpondeur (surtout quand elle fonctionne) ;
  • Le bruit raisonnable ;
  • La boite 6 avec overdrive pour baisser la consommation sur autoroute ;
  • La capacité d'emport : quel bonheur de pouvoir ranger les deux casques dans le Tour Pak pour aller faire une promenade en ville les mains libres !

Je n'ai pas aimé

  • L'autonomie réduite, mais le modèle 2008 offre un réservoir plus grand, contenant 3,8l d'essence supplémentaire, ce qui augmente sensiblement l'autonomie.
  • La jauge à essence, très peu progressive, et donc stressante.
  • Le freinage un peu limite, mais le modèle 2008 dispose de freins Brembo plus puissants et même de l'ABS?.
  • Le 6eme rapport trop long, mais cela a été corrigé avec le modèle 2009.
  • La chaleur qui se dégage du cylindre arrière. Une nouvelle cartographie d'injection corrigerait ce problème. Une amélioration est possible, mais qu'en est il de la consommation ? Et la température baisse-t-elle vraiment ?
  • L'alarme à transpondeur qui m'a joué un tour de cochon sur un parking de péage d'autoroute.
  • Le Tour Pak, qui casse la ligne générale de la moto. Peut-être est-il possible d'en mettre un qui soit facilement déposable ?
  • Le caractère moteur, qui est probablement bridé par les limites imposées à l'admission et à l'échappement par la législation française.

P.S : si d'aventure vous avez envie d'en louer une, c'est possible chez Paris V-Twin passion et demandez Gilles de ma part. Ils sont sympas et arrangeants !

Mise à jour : Contrairement à ce que laisse entendre un commentaire, la moto ne m'a pas été pretée à des fins publicitaires. J'ai loué la moto avec mes propres deniers, et j'ai décidé d'en faire un billet pour mon plaisir. Rien d'autre ! Le loueur, Paris V-Twin Passion, ne sait pas que je suis blogueur, et ne m'a donc pas consenti la moindre faveur. De même, Harley France n'a été impliqué en rien. Je pensais que cela coulait de source, mais je vois qu'il est nécessaire de mettre les points sur les I, ce qui est franchement regrettable. Ca en dit long sur le manque de crédibilité de la blogosphère et les relations malsaines que certains de ses membres entretiennent avec les marques...