Que l'on soit en vacances ou pas, nous avons tous plus ou moins le fantasme d'une petite île du Pacifique, près de l'équateur. Alors en guise de nouvelle de l'été, en supplément gratuit du StandBlog, je vous propose une petite fable qui raconterait l'histoire d'une de ces îles de rêve. Appelons la nôtre Nauru. C'est donc une petite île perdu au milieu de l'océan Pacifique, située près de l'équateur. La vie y est très calme et franchement rustique, jusqu'au jour où l'on découvre des richesses minérales insoupçonnées. L'argent coule alors à flots. Bien sûr, il a fallu faire des concessions au niveau de l'environnement. La déforestation massive nécessaire à l'exploitation des mines a provoqué la mort de tous les oiseaux, mais qui veut la fin veut les moyens, non ? Qu'importe, donc, puisque le niveau de vie est en très forte progression. Les habitants découvrent alors les bonheurs de la modernité et l'on importe tout ce que l'occident a fait de meilleur : voitures (même s'il n'y a qu'une seule route pour toute l'île), stereo et refrigérateurs, sans compter tout l'équipement video pour s'occuper. Du coté des habitudes alimentaires aussi, les choses changent vite : pourquoi boire de l'eau alors que le soda est bien meilleur ? Du coup, l'embonpoint des habitants de l'île ne cesse d'augmenter, et le diabète de se généraliser. Pourquoi travailler, alors que l'exploitation des ressources de l'ile suffit à payer tout ce bonheur qu'on importe : nourriture, eau potable et toutes sortes de gadgets. On ne travaille donc pas. Et comme on s'emm... vite sous les tropiques, on se contente de regarder à la video des western ou des films de kung-fu. Pour ce qui est des tâches ingrates, on importe de la main d'oeuvre, chinoise ou philippine. Pour faire les courses, c'est pratique : pas besoin de quitter la voiture (il faut dire qu'avec cette bedaine, c'est peu pratique), alors on s'arrête devant le magasin, on klaxonne, et le commerçant (forcément chinois) vient prendre la commande. Elle est pas belle, la vie ? On consomme, on s'abrutit devant la télé, et on meurt.

J'imagine le lecteur soupirer ou s'exclamant Il nous allèche avec son histoire d'ile paradisiaque, et finit par nous plomber le moral. Elle est con, cette fable ! En fait, je dois vous avouer quelque chose. Ca n'est pas une fable, c'est une histoire vraie. Et l'histoire de Nauru (c'est bien son vrai nom) nous est rapporté dans Libération du samedi 7 août 2004, page 7. Libé nous apprend que l'unique ressource de l'île, c'est le phosphate, et que les mines sont maintenant épuisées. Le gouvernement est en faillite absolue et doit près de 170 millions de dollars à la société américaine General Electric Capital Corporation. La conclusion de l'article est la suivante :

Mais sans le phosphate, Nauru n'est plus rien. Dans la perspective de l'épuisement de ses mines, Nauru avait imaginé un départ vers une autre île, mais elle pensait alors avoir les moyens de négocier l'installation sur une autre terre. Qui, aujourd'hui, accepterait de recueillir une nation toute entière, fût-elle composée de 10.000 habitants ? Une nation qui a pour tout héritage un désert de pierre et de corail.

Ce qui m'a frappé dans cette histoire, c'est le parallèle que l'on peut faire entre Nauru et notre planète. L'occident est particulièrement insouciant, consomme et surconsomme sans réfléchir, se laisse mener principalement par la perspective des gains financiers et délègue le sale boulot aux PVD. On carbure (et c'est le cas de le dire) aux énergies fossiles (donc non renouvelables), on réchauffe notre atmosphère à grands coups de CO2, on détruit la forêt primaire à tire-larigot, on souille notre eau potable avec des... phosphates (quelle coïncidence) ! Et quand on réalisera que la terre n'est presque plus habitable, aura-t-on compris la morale de la fable ? Permettez-moi de paraphraser la fin de l'article de Libération : Qui dans 1 ou 2 siècles, acceptera de recueillir une planête toute entière, fut-elle composée de 6 ou 7 milliards d'habitants ? Une planête qui a pour tout héritage un désert de pierre et une atmosphère polluée.