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vendredi 23 juillet 2010

Applications mobiles, le temps de l'ouverture

Il y a quelques semaines, j'étais invité par SFR à débattre sur ce sujet passionnant qu'est l'ouverture des AppStores pour applications mobiles. Ont participé à ce débat :

  • Sébastien Berten Président et Fondateur de Backelite
  • Philippe Caloud, Directeur Développement Terminaux et Applications Mobiles SFR
  • Stéphane Lebas, Directeur Applications et Stores SFR
  • … et votre serviteur, en tant que fondateur et président de Mozilla Europe.

Le débat — animé par le très pertinent Jérôme Bouteiller — était filmé, et certains extraits ont été montés et publiés sur Youtube. Les voici :

lundi 12 avril 2010

Le Smartphone de mes rêves

L'industrie du smartphone euh de l'ordiphone est en pleine effervescence. Pour moi qui suis fan de nouvelles technologies, professionnel du Web et souvent mobile[1], j'ai besoin d'un téléphone mobile qui réponde aux besoins suivants :

  1. émettre et recevoir des appels téléphoniques (si, si !)
  2. accéder au Web avec un navigateur moderne et personnalisable
  3. utiliser une application de cartographie avec GPS
  4. synchroniser mes contacts avec mes ordinateurs
  5. accéder à ma messagerie
  6. écouter de la musique stockée sur mes ordinateurs
  7. jouer quand je fais ma gym pour éviter de voir le temps passer
  8. possibilité d'ajouter des applications (natives ou Web) libres et propriétaires (et éventuellement payantes : je préfère payer que de subir la pub)

Le téléphone doit disposer des choses suivantes :

  1. une interface utilisateur bien pensée, intuitive et qui soit agréable à utiliser
  2. une autonomie correcte (2 jours ou plus)
  3. Une connexion à Internet via 3G et Wifi
  4. être hautement "bidouillable" : possibilité de créer, porter, partager, exécuter des applications sans avoir à demander la permission.
    1. possibilité de choisir son navigateur (Firefox, pour moi, avec ses extensions)
    2. possibilité de réutiliser d'une manière ou d'une autre du logiciel Libre
    3. possibilité d'utiliser la VOIP
    4. la liberté du code source du système d'exploitation est un (gros) plus.
  5. être stable
  6. avoir une bonne résolution d'écran
  7. être respectueux de ma vie privée (l'usage du téléphone ne doit pas être "logué" sur des serveurs et servir à me profiler, d'autant que je suis identifié par mon numéro de téléphone…)
  8. doit me permettre d'utiliser le ou les services que je veux dans le cloud (synchronisation, sauvegarde, réseaux sociaux, etc.) que je dois pouvoir quitter en faveur d'autres qui me conviennent mieux.

Pour l'instant, j'ai testé beaucoup de solutions en essayant les téléphones des collègues, et autant le dire tout de suite, rien ne me convient. J'ai un iPhone 3GS, qui est le moins pire des téléphones que j'ai pu essayer. Certains vous diront, sanglots dans la voix, à quelle point leur iPhone a changé leur vie. C'est effectivement un joli téléphone, plutôt stable (quoique), ergonomique, bien pensé… Mais il a des limitations regrettables qui sont d'autant plus affligeantes qu'elles découlent directement de décisions prises par l'entreprise qui a conçu le produit. Par exemple :

  • Toutes les applications doivent être acceptées par Apple, qui multiplie les bévues
    • Obligation récente d'utiliser un langage approuvé par Apple pour le développement
    • Censure d'applications pour des raisons prétendument "morales"
    • Interdiction des applications qui "dupliquent les fonctionnalités déjà disponibles" et fournies par Apple
    • Contrat de licence aberrant
    • Passage obligé par l'AppStore d'Apple, qui est payant.
  • Il se synchronise uniquement via iTunes (qui ne fonctionne pas sur ma machine Linux), et cette application est devenue horriblement lourde et complexe.
  • Un certain nombre de fonctionnalités sont bridées (Voix sur IP, synchronisation entre les versions mobiles et desktop d'applications impossible via le câble de synchro)
  • Dédain avoué pour la notion de "bidouillabilité" (même le changement de batterie doit être fait par le SAV certifié !).

J'ai aussi testé le BlackBerry (esthétique à la Windows 3.1, pas d'applications disponibles, navigateur consternant). Reste Windows Mobile (stabilité lamentable, ergonomie d'un autre siècle), mais on voit que Microsoft a décidé de ne plus ouvrir la plate-forme aux applications natives pour les futures versions (donc pas possible de choisir son navigateur).

Reste Android. Le navigateur de base est correct (c'est du Webkit, comme Safari d'Apple), et on pourra bientôt (mais quand ?) faire tourner Firefox et ses extensions. Le Nexus One est joli, son écran a une bonne résolution, il est basé sur Linux, il n'y a pas l'obligation de passer par un AppStore centralisé. Par contre, en terme de respect de la vie privée, c'est une catastrophe. Tous les contacts sont stockés chez Google, chaque utilisation de la commande vocale passe par les serveur de Google (associée à votre identifiant, bien sûr)… En substance, le Nexus One est un terminal Google qui fait aussi téléphone (et qui vous permet d'accéder à d'autre services, qui sont probablement surveillés par Google Analytics de toute façon).

A coté, l'iPhone — qui est le smartphone qui répond à tous vos besoins à condition que Steve Jobs les aient pris en compte — ferait presque figure d'innocent aux mains pleine en ce qui concerne notre vie privée. Alors, que choisir ? Google ou Apple ? Nexus One ou iPhone ?

Donner les clés de notre vie privée à Eric Schmidt ou se laisser enfermer dans une prison aux barreaux dorés par Steve Jobs ?

Aucune des deux solutions ne me convient, et si j'ai titré "le smartphone de mes rêves", je dois dire que pour l'instant, c'est un peu le smartphone de mes cauchemars…

Et vous, comment imaginez-vous le futur de l'informatique mobile avec une telle alternative ? Existe-t-il un téléphone qui pourrait répondre à mon cahier des charges ?

Quelques liens sur l'iPad et l'iPhone

Mise à jour, le 17/4/2010

Merci à tous ceux qui m'ont proposé différents modèles de téléphones.

  • FreeRunner OpenMoko. Venant de l'iPhone, j'ai peur que la marche soit juste infranchissable : c'est un peu comme si on proposait à un utilisateur de Mac de passer à une machine sous Gentoo ;-) . Bien sûr, coté bidouillabilité, il a tout ce qu'il faut. Mais c'est au dépend du reste, en particulier de l'expérience utilisateur. J'étais sur le stand Hackable Devices lors du dernier Solutions Linux, et même si je trouve le concept génial, je ne suis pas prêt à utiliser un tel téléphone...
  • Nokia N900. Grâce à Greg de MaemoFrance, Nokia m'a fait parvenir un N900, que je suis en train d'essayer. On en a plusieurs au bureau, mais ils sont réservés aux développeurs qui travaillent sur Firefox pour Maemo.

Notes

[1] Et amateur de musique pour faire bonne mesure.

mardi 29 décembre 2009

Rétrospective 2009

C'est la fin de l'année, et donc l'occasion d'en faire le bilan. C'est ce que je vous propose sur le thème du Web, de ses standards et des navigateurs. J'ai divisé ce bilan en trois points : l'évolution du marché des navigateurs, la montée en puissance de HTML 5 et l'apparition du modèle App Store.

Renforcement de la concurrence au niveau des navigateurs

  • Google Chrome en version 1.0 pour Windows en décembre 2008
  • Parts de marché de Firefox en constante augmentation (saisonnalité : on a toujours un plateau pendant l'été avec une forte augmentation en octobre novembre). Firefox a maintenant 350 millions d'utilisateurs actifs.
  • Baisse d'Internet Explorer toutes versions confondues
  • Sortie d'Internet Explorer 8, qui provoque la baisse d'Internet Explorer 7.
  • IE 6 résiste encore trop et plombe les services Web qui pourraient être beaucoup plus innovants sans lui.
  • Augmentation de la fréquence de sortie des nouvelles versions chez Mozilla (20 mois entre Firefox 2.0 et 3.0, 12 mois entre 3.0 et 3.5, 7 mois entre 3.5 et 3.6)
  • Arrivée des extensions dans Chrome 4 Beta fin novembre
  • Sortie de Chrome pour Linux et Mac OS X en version finale fin novembre 2009.
  • Chrome dépasse Safari en parts de marché et se retrouve donc troisième derrière Firefox et Internet Explorer.

L'actualité de l'année, c'est la montée en puissance des navigateurs modernes, sous la pression des libres, Firefox et Chrome[1]. Microsoft mène toujours en terme de parts de marché toutes versions confondues, mais Firefox se retrouve dominant dans plusieurs pays, dont l'Allemagne.

HTML 5 : maturation et visibilité

Au niveau technique, HTML 5 et CSS3, ainsi que plusieurs APIs et spécifications associées ont bien avancé à la fois sur le papier et au niveau d'implémentations intéropérables dans les navigateurs modernes. En voici un petit résumé, forcément incomplet :

Ce qu'il faut retenir de cela, c'est que les applications Web sont en train de monter en puissance. De plus en plus de possibilités sont offertes aux développeurs Web, ce qui fait qu'ils ne sont plus obligés de se tourner vers les applications natives.

Pour ceux que ça intéresse, mon collègue Paul Rouget (@PaulRouget) a publié plusieurs démonstrations de ces nouvelles technologies sur le blog Mozilla Hacks (@MozHacks).

On notera que les navigateurs modernes tels que Safari, Chrome et Firefox disposent chacun d'un moteur JavaScript qui est beaucoup plus rapide, du fait de l'adoption de la compilation juste à temps[2]. Ceci, combiné à la montée en puissance de HTML 5, permet au Web ouvert de gagner en crédibilité en tant que concurrent des technologies propriétaires comme Adobe Flash et Microsoft Silverlight[3]

Succès des App Store

Alors qu'Internet arrive sur les mobiles et que ces derniers sont de plus en plus utilisés pour se connecter, un phénomène nouveau est arrivé : les App Store, ces magasins en ligne qui permettent de télécharger de nouvelles applications (gratuites ou pas) pour les téléphones mobiles haut de gamme. Apple revendique ainsi 2 milliards de téléchargements pour 100'000 applications disponibles et 50 millions d'iPhone en circulation à ce moment là.

l'App Store d'Apple est à l'opposé des principes du logiciel libre et du Web ouvert :

  1. L'installation des logiciels ne peut se faire que depuis l'App Store. Le développeur doit payer Apple pour pouvoir utiliser le kit de développement et n'a pas le droit de diffuser lui même son application et signe plusieurs contrats et NDA (contrats de confidentialité). Il est du coup impensable de diffuser le code source du logiciel, sachant que l'utilisateur ne pourra pas l'installer lui même sur son iPhone.
  2. Apple a le contrôle total de ce qui est autorisé ou pas sur l'App Store, et peut refuser une application sans avoir à se justifier.[4]

Le succès de l'App Store d'Apple auprès des utilisateurs le positionne en concurrence des applications Web, car celles-ci sont pour l'instant moins ergonomiques que les applications natives et elles ne peuvent pas accéder à certains composants du téléphone comme le GPS, l'appareil photo et l'accélérometre. HTML 5 prévoit un certain nombre de solutions pour accéder à ces périphériques, via par exemple l'API Geolocation.

D'un point de vue financier, l'App Store se différencie du Web par le fait qu'il offre un modèle de rémunération aux développeurs, autre que la publicité. Toutefois, il semblerait que la perspective de rémunération mise en avant par les App Stores soit grandement exagérée. Ainsi, une équipe française a récemment démontré qu'une application raisonnablement réussie se révélait très déficitaire (3000 à 4000 EUR d'investissement pour 660 EUR de recettes).

Conclusion

2009 a été une excellente année du point de vue des standards et des navigateurs. En effet, les deux ont fait d'immenses progrès aux dépens des navigateurs obsolètes tels qu'IE 6 et IE7, ainsi que les technologies propriétaires telles que Flash. Par contre, une technologie concurrente s'est établie entre temps, celle des App Store, sous l'impulsion d'Apple, qui est suivi par d'autres acteurs du mobile, dont Palm (Palm WebOS Applications) et Android (Marketplace), avec des règles semble-t-il moins strictes.

Notes

[1] Chrome n'est en fait pas libre, mais est basé sur une base de code — Chromium — qui l'est.

[2] Opera 10.5, sorti fin décembre 2009 en pré-Alpha, dispose d'un moteur JavaScript comparable appelé Carakan.

[3] Ces deux technologies ne font pas partie de l'Open Web. Leurs applications sont certes diffusées via le protocole HTTP et s'affichent dans le navigateur, mais elles nécessitent l'installation d'un plug-in propriétaire sans lequel on ne peut pas faire tourner ces applications.

[4] C'est la raison pour laquelle il n'est pas possible de disposer d'une version de Firefox pour l'iPhone. Apple refuse les applications qui dupliquent des fonctionnalités existantes dans le téléphone tel qu'il est livré par Apple.

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