On trouve parfois d'excellents articles dans des endroits inattendus. Le dernier exemple en date, c'est Je n'arrive pas à être écolo, paru dans le cahier Été de Libération, censé être "ludique". On y trouve une citation de Séverine Millet (auteur de La stratégie du colibri). L'emphase est de mon fait :

La notion de limites apparaît insupportable à nos sociétés (...). Changer de comportement est insuffisant, la crise appelle à un revirement en profondeur du système de valeurs que notre éducation, notre culture, notre histoire ont contribué à forger.

Ca m'a fait plaisir de lire ces mots, ça ils résonnent avec ce que je sens depuis que je m'intéresse à l'environnement. En substance, je sens un décalage croissant entre les valeurs qui m'ont été inculquées et ce qu'il faudrait que je fasse (et que nous fassions tous) pour que la race humaine ait un avenir sur cette planète. Voici quelques notes sur les valeurs qui nous sont inculquées par nos parents, la religion, l'école, l'entreprise, la télévision et la publicité (j'oublie sûrement d'autres facteurs d'influence) :

  • Il faut manger de la viande plus souvent. C'est bon pour la santé. Sauf que la production de viande est très polluante en terme de CO2 par rapport à ce qu'elle fournit en terme de calories par rapport aux sources végétales de protéines. Mais bon, c'est pas facile d'aller à la fois contre ce qu'on nous a répété pendant toute notre enfance et contre le lobby de la filière viande...
  • Pas d'économie en bonne santé sans croissance. Là, c'est carrément un dogme économique, un truc qu'on ne peut pas remettre en cause. Et pourtant...
  • Réussir, c'est gagner beaucoup d'argent et avoir une belle voiture qu'on change souvent. Ici, c'est la combinaison du couple jalousie/orgueil d'une part et de la publicité d'autre part. Hyper puissant. Quasiment imbattable.
  • C'est important d'être bien habillé (et d'avoir des vêtements à la mode). Sur l'air de "t'es has-been, t'as les mêmes lunettes de soleil que l'année dernière !". Ca repose sur l'envie de plaire, d'avoir l'air riche, le besoin d'apparence, soutenu en bloc par l'industrie de la mode qui a tout intérêt à ce qu'on n'attende pas que les vêtements soient usés pour les changer.
  • J'ai gardé le plus tabou pour la fin : Il faut faire des enfants. Que les choses soient claires : j'ai deux enfants, je les adore, et je suis ravi de les avoir ! Mais voilà, dans notre société, il faut avoir des enfants. C'est la norme. Si possible plus de deux. Pourtant, avoir un enfant de moins est 20 plus efficace pour réduire les gaz à effet de serre que toute une vie à utiliser des ampoules basse consommation ou un véhicule hybride. Et on a le tabou ultime, car on combat la parole divine, via le premier livre de la genèse, "Croissez et multipliez", reprise par le Pape Jean-Paul II.

Pour être franc, j'ai un peu honte d'écrire un pareil billet. Dire au gens qu'il faut limiter le nombre d'enfant, c'est carrément "contre-nature" (si j'ose écrire). C'est tabou.

De même, critiquer la croissance, c'est s'assurer qu'on va passer pour un odieux gauchiste, un révolutionaire, un rebelle, un aigri, un "mec qui n'a rien compris", un raté qui tente d'imaginer une société dont les règles lui seraient plus favorables que celle dans laquelle il est perçu comme un loser.

J'ai même l'impression que le statut tabou de ces valeurs est bien pratique pour disqualifier ceux qui questionnent. Ca permet facilement de nier l'importance de ces questions, comme si la société avait mis en place des barrières pour qu'on évite de remettre en cause ses fondements.

Dans l'esprit participatif de ce blog, j'ai quelques questions pour toi, cher lecteur :

  • As-tu noté d'autres valeurs qui nous sont transmises et qui nous empêchent d'être écologiquement responsables ?
  • Où et comment ces valeurs nous sont transmises ? J'ai cité "nos parents, la religion, l'école, l'entreprise, la télévision et la publicité". En connais-tu d'autres ?

Merci de laisser vos réponses dans les commentaires ci-dessous.

Mise à jour :

Après discussion et réflexion sur le dernier tabou, celui de la natalité, il est apparu que le facteur premier est tout simplement biologique. La priorité première pour un individu d'à peu près toutes les races – y compris animales et végétales – c'est d'assurer la reproduction de l'espèce. Après, les religions, l'école & co ne font que reprendre ce thème pour le renforcer. C'est pour cela qu'il est si tabou : il revient à nier notre essence biologique même.